A l'occasion de la sortie du deuxième tome des Souliers Rouges, nous avons rencontré le dessinateur Damien Cuvillier. Il nous parle de son travail en couleurs directes, de sa collaboration avec Gérard Cousseau son scénariste, et de son éditeur Grand Angle qu'il adore ! Un jeune auteur qui enchaîne les projets avec bonheur, et dont les superbes dédicaces ont enchanté les clients de la librairie Lumière d'Août à Rouen.
interview Bande dessinée
Damien Cuvillier
Réalisée en lien avec les albums Les Souliers rouges T2, Les Souliers rouges T1
Bonjour Damien, est-ce que tu peux te présenter ?
Damien Cuvilier : Oui, je suis Damien Cuvillier, dessinateur de bandes dessinées et auteur des deux albums de La Guerre Secrète de l'Espace avec Régis Hautière, et dernièrement Les Souliers Rouges avec Gérard Cousseau.
Tu abordes Les Souliers Rouges avec un style renouvelé par rapport aux Guerres Secrètes. C'est voulu, j'imagine...
Damien Cuvilier : Disons que c'est mon style plus ou moins naturel. Les deux tomes sont en couleurs directes, c'est ce que j'ai toujours voulu faire, la couleur pour moi ayant toujours été plus naturelle et d'une certaine manière moins laborieuse que le dessin. C'est vrai que sur mes albums précédents j'avais travaillé en noir et blanc, et un coloriste avait travaillé dessus, mais là ça s'est fait assez naturellement. Lorsque j'ai fait une page d'essai à l'aquarelle pour l'éditeur, il l'a prise comme ça, et j’étais vraiment heureux que ce soit le cas, je pensais que ce serait plus difficile à faire passer.
La collaboration avec Gérard Cousseau s'est faite comment ? C'est l'éditeur qui vous a présentés ou c'est quelqu'un que tu connaissais ?
Damien Cuvilier : Gérard et moi on se connait depuis un petit moment maintenant, je l'ai rencontré grâce à un ami dessinateur. On a sympathisé tout de suite et on a déjà travaillé ensemble, sur un album humoristique sur les sauveteurs en mer (ndlr : Les Sauveteurs en Mer, un tome paru en 2010). Il était prévu pour le Journal de Mickey mais finalement est sorti chez Vents d'Ouest. Dès le début, dès notre première rencontre je crois, Gérard m'avait parlé de ce projet des souliers rouges qu'il avait en tête. Lorsque je réalisais La guerre secrète, Gérard et moi on en discutait régulièrement. A la fin du tome 2 de La guerre secrète, je ne savais pas trop où mes projets allaient m'emmener, et puis Les Souliers Rouges sont revenus et c'est parti. C'est très naturellement qu’on s'est lancé ensemble dans le projet. C'était un vrai plaisir de travailler avec Gérard parce qu'avant tout c'est un super copain. Quand on travaille avec un scénariste c'est aussi pour passer du temps avec lui. A la limite le projet est un prétexte !
Tu savais dès le début du premier tome des Souliers Rouges que l'histoire allait se durcir, s’assombrir au fil des pages ?
Damien Cuvilier : Oui je le savais, mais il faut préciser que l'histoire était initialement prévue en un seul volume, pour un autre éditeur d'ailleurs. Mais quand on l'a proposé à Grand Angle ils nous ont tout de suite proposé de le faire en deux volumes. Finalement ça nous allait très très bien. Et effectivement il y a ce côté un peu plus crépusculaire, un peu plus plus hard dans le tome 2. Je le savais et je m'y préparais, à ce vrai contraste entre les deux albums. Mais l'histoire porte tout cela très bien à mon sens Ça doit être rare de se voir proposer deux tomes au lieu d'un ?
Damien Cuvilier : Effectivement c'est Hervé Richez, directeur de collection chez Grand Angle qui nous a proposé ça, et il avait vraiment raison. Du coup on a pu mieux développer certaines choses, et l’amorce du coté sombre se fait mieux, beaucoup plus progressivement. Sur un seul album cela aurait été plus radical.
Graphiquement tu choisis l'exigence de la couleur directe, donc la nécessité d'y passer du temps...
Damien Cuvilier : Effectivement, d'emblée j'étais content de pouvoir le faire en couleur directes, et forcément ça prend du temps. Le premier tome avec la recherche de documentation en amont, a pris un an et demi. Mais l'éditeur a vraiment suivi, ils ont très bien accompagné le projet, en amont comme lors de la sortie. Je suis hyper content du travail qui a été fait par Grand Angle, c'est un super éditeur !
Graphiquement tu sembles durcir les encrages en milieu de tome 2, comme pour accompagner la fin du récit...
Damien Cuvilier : C'est vrai, on m'en a fait la remarque, et je ne m'en étais pas rendu compte, mais je crois que c'est dû aussi à ce que je raconte, le trait s'adapte forcément. Sur la longueur d'un bouquin, un an ou un an et demi, c'est évident que le style change. On peut ressentir l'effet des événements, de ce qu'on lit, des influences aussi. Graphiquement sur les scènes de fin il y eu un parti pris assez différent, mais heureusement ça n'a pas l'air d'avoir choqué les lecteurs, je suis rassuré !
On a pu voir sur le net des vidéos où tu participes à des happenings graphiques et musicaux, en dehors du champ de la BD. Mais désormais est-ce que la bande dessinée prend tout ton temps ?
Damien Cuvilier : Oui, je ne fais vraiment plus que ça aujourd'hui, et surtout je ne me vois pas faire autre chose. Je suis très content de ne pouvoir faire que ça, je passe mon temps à dessiner et... ça fait des belles journées.
Tu peux nous parler de tes prochains projets, nous dire de petites choses sur ce qui va se passer après ?
Damien Cuvilier : Ce que je peux dire c'est que mon prochain album sera chez Futuropolis avec Kris au scénario (qui a scénarisé Notre Mère La Guerre entre autres), et un co-scénariste qui s'appelle Bertrand Gallic. Ça sortira en septembre 2016, et ça raconte un épisode de la guerre d'Espagne..., mais à Brest. Pas mal comme accroche, non ?
Pas mal effectivement. Ce sera en couleurs directes ?
Damien Cuvilier : En couleurs directes, oui.
Une dernière question Damien. Si tu pouvais te plonger dans le crâne d'un auteur, dessinateur ou scénariste pour comprendre ses secrets, ce serait qui ?
Damien Cuvilier : Je comprends l'idée, mais à la limite pas forcément être dans la tête de quelqu'un en particulier. A chacun ses névroses après tout, je me débrouille bien avec les miennes (rires). A la rigueur j'aimerais bien être invisible et pouvoir observer un dessinateur en train de créer une page. C'est un truc dont je ne me lasse jamais, en festival j'adore regarder les copains dessiner, la création d'un dessin c'est quelque chose qui me bluffe toujours autant. Il y a pas mal de dessinateurs qui m'impressionnent et que j'aimerais comme ça observer sans les gêner. Alors si tu me demandes un choix, un auteur qui m'influence énormément et qui n'en finit pas de m'épater à chaque album c'est Christian Rossi. Il a un parcours assez extraordinaire parce que sur chaque album il part dans des directions différentes. Il a de vrais parti pris graphiques, et en même temps une narration extraordinaire. C'est un vrai auteur de bandes dessinées. Donc oui, Christian Rossi.
Merci Damien !