parution 01 juin 2009  éditeur Futuropolis  Public ado / adulte  Mots clés Chronique sociale

Le landais volant T1

Conversation avec un margouillat

Le fringant gascon Jean-Dextre Pandar est un inconditionnel des voyages en Afrique. L’occasion de se poser mille questions sur ses jugements et ses préjugés. Une brillante et nécessaire réflexion sur notre rapport au racisme et aux chocs culturels.


Le landais volant T1 : Conversation avec un margouillat (0), bd chez Futuropolis de Dumontheuil, Merlet
  • Notre note Yellow Star Yellow Star Yellow Star Grey Star

    CHEF D'ŒUVRE   Green Star Green Star Green Star Green Star

    TRÈS BON   Green Star Green Star Green Star Dark Star

    BON   Green Star Green Star Dark Star Dark Star

    BOF. MOYEN   Green Star Dark Star Dark Star Dark Star

    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

  • Scénario Yellow Star Yellow Star Yellow Star Yellow Star

    CHEF D'ŒUVRE   Green Star Green Star Green Star Green Star

    TRÈS BON   Green Star Green Star Green Star Dark Star

    BON   Green Star Green Star Dark Star Dark Star

    BOF. MOYEN   Green Star Dark Star Dark Star Dark Star

    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

  • dessin Yellow Star Yellow Star Yellow Star Grey Star

    CHEF D'ŒUVRE   Green Star Green Star Green Star Green Star

    TRÈS BON   Green Star Green Star Green Star Dark Star

    BON   Green Star Green Star Dark Star Dark Star

    BOF. MOYEN   Green Star Dark Star Dark Star Dark Star

    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

L'histoire :

Jean-Dextre Pandar est un gascon, fier de ses origines de Cadillac, mais ouvert au monde, avide de se confronter à d’autres cultures. Ventripotent dans son t-shirt trop court, short, sandalettes, chapeau, un catogan et une barbichette (à la manière d’Artagnan), on le retrouve aujourd’hui à Mopty, ville du Mali au bord du fleuve Niger, en train de siester tout en devisant avec un margouillat (lézard) de sa conception de la culture qu’il découvre. Des femmes claquent des mains en pilant le mil pour éviter qu’elles ne s’échauffent (les mains, pas les femmes)… Une femme demande le divorce en séance publique parce que son mari insiste pour l’honorer 12 fois par jour (cela nuit à son labeur). En fait, il craint plus que tout, les préjugés issus de sa civilisation colonisatrice. Saura t-il s’affranchir de tout néo-colonialisme latent ? Il est donc très (trop ?) vigilant sur ce point, quitte à vilipender fièrement ce que les noirs appellent un « bounty » (noir dedans, blanc dehors), c'est-à-dire un noir qui dicte sa loi aux autres noirs de la même ethnie, uniquement parce qu’il a été éduqué à l’occidentale. Mais l’Afrique et l’alcool rivalisent aussi pour échauder les sens…

Ce qu'on en pense sur la planète BD :

Après la trilogie Bigfoot, western jouissivement décalé, Nicolas Dumontheuil dégaine de nouveau ses crayons chez Futuropolis, avec cette fois un propos assez inédit dans son approche et parfaitement réussi dans sa forme. Ce drôle de Landais volant (référence burlesque au « hollandais volant », célèbre vaisseau fantôme) partage en effet ses réflexions culturelles et sociales culottées, sur plusieurs périples africains. En fait, la question essentielle de l’œuvre est de savoir s’il est possible, pour nous autres occidentaux post-colonisateurs, de porter un regard non raciste, non néo-colonisateur. Au travers de milles anecdotes bizarres et incongrues (dont un clin d’œil bien senti à Tintin au Congo), enchaînées avec l’alcool, les femmes, les excursions ou avec ses rêves, il porte une réflexion légère, essentielle et superflue sur le sujet. Or, plus Jean-Dextre cherche à s’affranchir de sa propre culpabilité historique, et plus il embrasse ses préjugés. Eprouvé et affiné durant des années au sein du magazine la Lunette, ce personnage folklorique ne comprend rien à rien, mais veut être exemplaire. Ce gascon a le bagou et la soif de découvertes de Tartarin, ainsi que le look de d’Artagnan, quoique surtout de Jean-Denis Pendanx (le dessinateur de Jeronimus, Abdallahi), qui a véritablement servi de modèle visuel à Dumontheuil. Selon les dires de l’auteur, Pendanx ne lui en tiendrait pas rigueur et s’en amuserait beaucoup (il apparaît également dans la Marie en plastique de Rabaté). Dans les 3 chapitres développés, dont l’inspiration semble issue des propres expériences de l’auteur (au Mali, Burkina Faso puis Bénin), il nous cueille systématiquement là où on ne l’attend pas, empruntant des chemins sinueux pour une démonstration magistrale : il semble impossible de ne pas juger, avec notre œil plein de certitudes, de mœurs et de coutumes qui nous échappent. La grande force de la démarche, c’est d’être incroyablement pertinente sans jamais chercher à sermonner. Dumontheuil se pose simplement des questions : de son propre aveu, il n’a jamais rien compris aux voyages…

voir la fiche officielle ISBN 9782754802703