L'histoire :
A l’invitation d’Agathe, une ex avec qui il a vécu quelques années, mais qui l’a largué il y a environ 30 ans, Louis est revenu sur les rives de la Loire. Il a voyagé en train jusqu’à Angers et décide de terminer les 7-8 derniers kilomètres à pieds, pour se replonger avec nostalgie dans les balades campagnardes de jadis. Alors que le soleil se couche et qu’il longe une plage désertée qu’il connait, il décide de se baigner dans le fleuve, à poils ! Il s’est déjà baigné là il y a des dizaines d’années… et c’est la première fois qu’il se laisse piéger par le courant. Louis ne lutte pas, il sait que ça ne sert à rien. Il se laisse emporter et croise alors des pécheurs ou des bateliers qui s’inquiètent de son sort. Il dérive ainsi sur 3 kilomètres et finit par être déposé sur une grève… mais sur l’autre rive. Etant donné qu’il est nu, il attend sagement que la nuit tombe et se fend d’un trajet retour par les routes obscures. Il met toute la nuit à retrouver son chemin et ses vêtements. Il arrive chez Agathe au petit matin. Mais elle n’est pas là, ce sont ses voisins Lydia et Samuel qui l’accueillent avec un petit café. Tout comme ils accueillent Jalil juste après Louis. Jalil est un autre ex d’Agathe, qui lui a succédé… et envers lequel Louis nourrit toujours un ressentiment légitime. Puis c’est au tour de Suzanne d’arriver… Puis Nicolas… Décidément, Agathe a convoqué tous ses ex. Mais elle, n’est toujours pas là.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La Loire et ses berges servent de cadre, majestueux, prédominant, tranquille, à cette histoire sentimentale… mais ce grand fleuve n’est pas précisément le sujet. Il difficile de parler de ce nouveau roman graphique en one-shot d’Etienne Davodeau, sans révéler ce cœur de sujet. Au risque de spoiler (ne lisez pas la suite si vous voulez vous préserver la surprise !), le sujet ici, c’est le deuil. Ou disons plutôt, les ressources proposées par la nature pour accompagner un deuil. Nous ne croiserons en effet pas la fameuse Agathe, puisqu’elle est morte. Et Davodeau n’est pas coutumier des flashbacks. A sa demande testamentaire, ses ex se retrouvent tous réunis, pour partager un moment, évoquer leurs souvenirs avec elle, mais sans parler de leurs vies d’après. Telle est la règle de ce récit mémoriel assez long, malgré le propos finalement simple. Au centre, il y a bien entendu notre personnage sexagénaire et un peu alcoolique de Louis, qui s’interroge sur l’éventuelle paternité et grand-paternité qu’Agathe lui aurait donné… Mais là encore ne se trouve PAS le sujet. La piste est abandonnée, Davodeau évacue autant la transmission que l’appartenance ou l’hétérogamie de sa conception du couple. A un moment, on est ensemble, et puis on ne l’est plus. Ainsi coule le long fleuve tranquille de la vie commune, comme cette Loire sur laquelle il fait des pauses contemplatives régulières, lorsqu’un besoin de se ressourcer se fait sentir après bien des bouleversements émotionnels.
