L'histoire :
Un éminent personnage politique en fin de règne quitte une cérémonie donnée en son honneur au cœur du musée du Louvre. Les « courtisans », qui ont cru bon d'installer le banquet au pied d'un majestueux tableau en l'honneur de Napoléon, ne trouvent aucune grâce aux yeux de l'homme de pouvoir, sensible et cultivé. Il quitte donc en douce la salle de réception. Il rencontre alors une jeune fille assise devant un tableau, que les gardiens du musée ont croisée sans la voir. Très belle avec ses cheveux attachés qui dévoilent une nuque très fine, elle charme le vieil homme en un coup d'œil, et l'invite à une promenade au cœur du musée désert. S'ensuit un dialogue pétillant et malicieux, entre un homme chargé de son expérience et lourd de son passé, et une jeune femme insouciante, qui éveille en lui une foule de sentiments. Au rythme des tableaux et des promenades magnifiques du Louvre, quelques instants de bonheur insouciant...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C'est un privilège pour un auteur de BD que d'entrer dans la prestigieuse collection d'albums coédités par Futuropolis et le musée du Louvre. Pour Christian Durieux, qui partage sa carrière entre œuvres intimistes et grand public, c'est l'occasion de laisser aller son dessin sans contrainte. La balade pleine de légèreté du vieil homme et de la jeune femme, au gré de salles vides et de chaussures balancées dans les escaliers, illustre cette liberté de création. L'évocation de tableaux du magnifique musée, passage obligé de tout album de la collection, n'est jamais trop appuyée. Elle suffit juste à titiller le lecteur vers les coups de cœur de l'auteur. Parfaite démarche d'interpénétration des publics de la BD et de la peinture, dans un format luxueusement imprimé, qui vous poussera peut-être à découvrir l'œuvre de Watteau, mise en avant par Durieux. L'album en lui-même se lit agréablement, une fois qu'on a renoncé à savoir si le personnage qui quitte la cérémonie du début ne serait pas une sorte de François Mitterrand en fin de mandat. N'y pensez pas : cela n'a aucune importance, la poésie de la rencontre opère d'autant mieux qu'on n'en comprend pas tous les secrets. Graphiquement libre, Durieux nous offre des planches douces et légères. L'ouverture de l'album, classique et précise dans la représentation de la foule et des grandes salles du musée, laisse parfois place à des silhouettes sombres qui déambulent sur des décors aux perspectives fluctuantes. Les détails graphiques ne sont présents que lorsque cela est jugé nécessaire, comme pour les très jolis yeux de la jeune inconnue. Beaucoup de délicatesse et de poésie dans ces pages qui défilent, pour garder au final une part de mystère lorsque le lecteur aura refermé l'album. Et laisser le souvenir du chemin d'un homme touché par l'émotion. C'est peut-être ce qui vous attend à votre tour.
