L'histoire :
Le buffle d’eau : Les enfants ont pris pour habitude de déranger un buffle d’eau, qui vit dans une parcelle envahie par l’herbe au coin de la rue, lorsqu’ils ont besoin d’un renseignement. Cependant, l’animal se contente à chaque fois d’indiquer une direction : pas si innocent qu’il n’y parait.
Éric : Une famille reçoit dans sa maison un étudiant étranger. Chacun s’emploie à tout mettre en œuvre pour que le jeune homme se sente chez lui : chambre repeinte et tapis neuf ; visite de la ville ; bonne cuisine… Mais Éric choisit d’étudier et de dormir dans le placard de la cuisine et porte peu d’intérêt aux attentions de ses hôtes. Et pourtant…
Jouets cassés : Deux gamins observent un pauvre homme qui se ridiculise en déambulant dans la rue accoutré d’un scaphandre de plongée. En outre, cet hurluberlu s’exprime uniquement en japonais en tenant un grotesque petit cheval de bois craquelé et décoloré. Les enfants imaginent lui jouer un mauvais tour en l’enfermant dans le jardin de Mme Cata, une vielle grognon…
Orage à l’horizon : Que deviennent les poèmes griffonnés sur un bout de papier, puis jetés sans que personne ne les aient lus ? Servent-ils à caler des meubles bancals ? S’évanouissent-ils pour de bon sans aucune utilité ? Finissent-ils par rouler jusqu’aux pieds des enfants ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pas encore tout à fait une BD (le texte, prépondérant, est mis en vis-à-vis de l’illustration) et pas vraiment un album jeunesse, au regard de la maturité dont il faut s’armer pour en apprécier la poésie, ces Contes de la banlieue lointaine sont, en tout cas, une œuvre originale méritant notre attention. Ceux qui ont gardé intact le souvenir de la gifle reçue à la lecture de Là où vont nos pères, tendront certainement leur joue, pour retrouver l’inégalable manière qu’a Shaun Tan de conter. Certes, ici, c’est d’abord le texte qui fait son œuvre (pour rappel, l’album primé à Angoulême en 2008 était totalement muet) pour des récits nimbés de doux mystère et d’une infinie poésie. On retrouve souvent à l’intérieur de chacun d’eux des thématiques déjà mis en valeurs dans les précédents travaux : la difficulté d’être ou de se sentir différent ; le déracinement ; la perte des repères ; la douce ou douloureuse nostalgie… Le tout pudiquement enveloppé du voile de l’insolite ou de l’étrange, nous laissant imaginer qu’on est plongé dans une autre dimension et qu’en dehors d’un exercice poétique, il n’y a pas d’autre leçon à en tirer. Le dessin est quant à lui plus qu’un écrin. Il sert souvent de véritable révélateur au sens poético-philosophique du texte en vis-à-vis : Shaun Tan a cet indéfinissable talent de faire aussi bien parler son trait que ses mots. En bonus, on se délecte des multiples approches graphiques proposées (collages inventifs, styles de dessin différents, colorisations contrastées…), qui démontrent le génie créatif et le soin apporté à la conception de ce recueil sage et intelligent. Un ouvrage donnant l’envie de retrouver très vite cet auteur, dans un album faisant à nouveau plus de place à son dessin.
