L'histoire :
John travaille à la construction d’un building, lorsqu’on son contremaître l’avertit que sa femme vient de perdre les eaux. Il fait aussi vite que possible pour la rejoindre à la maternité. Il court sur le chantier comme un forcené, traverse la ville en taxi et arrive juste après la naissance. Juste à temps pour embrasser sa femme et sa fille. Juste une seconde avant le grand souffle blanc… qui signe l’apocalypse. Huit ans plus tard, John et sa fille, prénommée Grace, ont survécu. Ils traversent un paysage de désolation à dos de cheval, lorsqu’ils tombent dans un guet-apens tendu par deux hommes armés de fusils. Le duo d’agresseurs ne remarque pas la particularité morphologique de Grace, dont le visage est dissimulé par une capuche. Dommage pour eux… Car la fillette bondit en un instant sur l’un des gars. Ses canines et des griffes rétractiles, deviennent des armes mortelles, de tailles démesurées. La sauvagerie que son organisme convoque est inouïe… Il faut toute la raison de son père pour qu’elle ne transforme pas les deux bandits en chair à pâté. Le père et la fille les laissent filer ailleurs, ventres à terre. Ainsi est Grace, comme bien d’autres enfants nés au moment de l’apocalypse : poilus, dentus, griffus, porteurs de gènes simiesques proches des sapiens préhistoriques… à la fois terriblement dangereux et menacés, dans un monde déshumanisé qui n’a pas terminé sa déliquescence…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le traitement délavé et la mise en page « pulp » de la couverture, ainsi que le registre fantastique de « série B » imposent le ton de cette nouvelle série, qui inaugure la nouvelle collection Grindhouse de Glénat – qu’on pourrait diversement traduire par grunge-punk-underground-horrifique… mais on est largement inexact. On est tout aussi inexact en rangeant Amazing Grace dans le tiroir des séries B. Il est certes vrai qu’Aurélien Ducoudray ne cherche pas à donner une grande profondeur de civilisation à son aventure, lui préférant sa dimension spectaculaire et la puissance de son contexte post-apocalyptique, officiellement située en 2035 (en 4ème de couv). Mais le scénariste a de la bouteille et du savoir-faire et il rythme admirablement cette mise en bouche. On s’attache immédiatement à ce duo père-fille qui traverse des paysages en désolation et une humanité en berne, car le « super-pouvoir » de sauvagerie dont dispose la fillette est raisonné par une ligne éducatrice vertueuse (on ne tue que pour manger). Les « effets spéciaux » sont assurés par Bruno Bessadi, qui a déjà pas mal éculé le registre du gore avec Zorn et Dirna. Il se contente donc ici d’un post-apo d’ambiance plus classique, dans son contexte survivaliste. Son dessin semi-réaliste se dévoile à travers une mise en scène aérée, souvent de grandes cases (surtout au début) qui font la part-belle aux personnages et à leur expressivité – son perso de Grace a un petit quelque chose de Dirna. Enfin, la colorisation experte de Fabien Alquier ajoute pas mal de réalisme à ce road-trip désespéré, que le cliffhanger aiguille vers une problématique nouvelle au prochain tome…