L'histoire :
Au palais de justice de la grande principauté de Gerçure d’Orteil, toute la ville est dans les gradins. Le tribunal est réuni pour la première fois en 83 ans, depuis le début de l’ère du bien. Le tribunal avait d’ailleurs perdu sa raison d’être et les magistrats réunis pour l’occasion sont un peu rouillé. L’accusé est un nain ritalien du nom de Burrato. Le tribunal lui reproche d’avoir volé la caisse de la station de téléphérique où il travaille et d’avoir occis son compagnon de garde pour cacher son méfait. Dans ce simulacre de justice et dans la confusion totale, Burrato réussit à s’enfuir après avoir assommé quelques gardes et étouffé le juge. En sautant par la fenêtre, il s’accroche de toutes ses forces à une sorte de montgolfière. Porté par le vent et poursuivi par la brigade d’hélium, Burrato n’est plus tellement maître de son destin. D’ailleurs, une énorme flèche vient percuter son dirigeable et ce dernier explose, laissant le nain ritalien lutter contre la pesanteur. Amorti par les branches des arbres de la forêt de sombrépines, sa vertigineuse descente se termine 25 pied au-dessus du sol. Durant sa chute, il a le temps de faire le point sur les évènements qui viennent de se dérouler. Il en est sûr, il doit retrouver son cousin Mozzarello, car il n’a aucun doute sur l’auteur de cet affreux cambriolage...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cette nouvelle série réalisée par Joann Sfar et Nicolas Keramidas est peut-être intéressante, mais pas accessible à tous. Le scénario est gorgé de second degré, de petites piques envers notre société, de digressions drôles ou écœurantes en quelques mots. Le récit n’est pas filtré, il y a à boire et à manger. D’ailleurs, l'heroïc-fantaisy est une bénédiction pour la plume acérée de Sfar qui use et abuse des codes du genre, jusqu’à outrance. Basé sur une histoire plutôt simple, le récit dérape rapidement dans une situation ubuesque au tribunal. Là, Burrato, le nain « ritalien » accusé des méfaits, tente d’étrangler le juge en pleine séance, avant de s’élancer dans les airs et de s’enfuir avec un ballon dirigeable. La suite est un enchainement d’évènement plus cocasses les uns que les autres. Malgré cela, le texte de Sfar n’est pas dénué de sens. Au-delà de l’aspect farfelu des mises en situation, la critique sociétale est bien présente. Justice incompétente, racisme systémique, crédulité spirituelle, naufrage de l’éducation, sont certains des nombreux thèmes d’une liste non exhaustive, qui sont développés de façon sous jacente (ou non) dans le récit. Même si ces points apportent une certaine réflexion, le récit est assez tortueux et limite fortement l’accès au plus grand nombre. L’univers graphique développé par Nicolas Keramidas colle cela dit parfaitement au genre. Il y a beaucoup de travail de l’auteur pour rendre le récit fluide et le grand nombre de personnages principaux ou secondaires n’aide pas à simplifier l’ensemble. Ainsi, cet album ne laissera pas indifférent. Malgré une belle réflexion sur de nombreux thème sociétaux, cet album part réellement dans tous les sens en flirtant parfois avec la zone grise, ce qui ravira les amateurs du genre (ou des auteurs), mais refroidira les autres.