L'histoire :
Gare de Lyon, de nos jours. Pierre Cartolina a rendez-vous avec une anglaise prénommée Rose Lanobre. Elle est la fille de deux amis d’enfance, Gilles et Theda. Il repense aux sixties, à cette époque Peace and Love où ils voulaient croire à un monde meilleur. Ils rêvaient de fuir la société de consommation qui leur tendait les bras pour un lopin de terre dans le Larzac avec son jardin, son verger, ses chèvres et quelques poules. Gilles et Theda avait franchi le pas… Rose arrive et s’assied. Comme l’indique la lettre qu’elle a envoyé à Pierre Carlonia, elle voudrait connaître l’histoire de ses parents. Tout a commencé à Paris, aux Beaux-Arts, où ses parents l’avait inscrit, lui le cancre qui n’était fort qu’en dessin. Il croque les modèles femmes et hommes qui viennent se déshabiller. Il a quinze ans et demi et les autres élèves ont une petite vingtaine d’années. C’est là qu’il rencontre Gilles et deux de ses amis, les bien-nommés Pied de Poule et Prince de Galles, deux élèves peu intéressés par le dessin académique et plus par l’idée de s’amuser. L’arrivée de Theda va bouleverser tout ce petit monde…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
On ne présente plus le couple Charles, dont la carrière est riche tant par la qualité de leurs albums que par leur nombre. Une fois n’est pas coutume, ils délaissent ici la pure fiction, pour une histoire plus personnelle évoquant leur jeunesse à la fin des années 60. Maryse était alors au lycée et Jean-François, étudiant à l’Académie des beaux-arts de Bruxelles. Ils n’étaient pas, à proprement parler, des hippies, mais dans l’air flottait quelque chose de nouveau, outre une odeur de Marie-Jeanne (d’où le tire, l’Herbe folle). En rassemblant leurs vécus (y-a t-il un peu de Pierre dans Jean-François et de Maryse dans Theda ?), ils créent une histoire attachante où l’écriture est pleine d’émotions, avec douceur et délicatesse. Les mots s’enchaînent subtilement dans ce récit où l’amour, le sexe et les pétards font bon ménage. Il souffle un vent de liberté symbolisé par Theda, qui fait tourner les têtes des garçons. Ils sont totalement subjugués par la beauté et la personnalité de la jeune anglaise. La société de consommation est rejetée, remplacée par des nouvelles pensées : un monde s’éteint et un autre s’éveille. Les jeunes adultes rêvent de nature, d’amour libre, d’un nouveau monde : aller à Katmandou, écouter du rock, élever des chèvres dans le Larzac… Les Charles n’idéalisent pas cette époque, bien au contraire, ils la racontent dans sa globalité, sans rien occulter, avec une fin bien amenée. Que dire du dessin de Jean-François Charles, toujours aussi magique. Son trait s’exprime avec une liberté totale (la case image d’Épinal p.50 tranche avec le reste), car moins engoncé dans les formats classiques. Les scènes de sexe abondantes sont belles et sensuelles, les références graphiques multiples (Orange Mécanique, Jean Yanne, Theda Bara, Ali Mc Graw…). L’herbe folle vous fera passer un bon moment. Faites tourner...
