L'histoire :
La vie sourit à Céleste Bompard, pilote d'avion connu pour sa maîtrise du monoplan qu'il fait virevolter dans le ciel de France. Son talent et son ego démesuré le conduisent à repousser sans cesse les limites de sa technique, profitant de son succès pour séduire le plus grand nombre de femmes possible. Mais très bientôt, arrive 1914 et le début de la Grande Guerre. Céleste devient naturellement un pilote très utile, que ce soit pour des missions de combat, ou pour transporter le courrier du front vers les familles des soldats. C'est lors d'une de ces missions qu'il se fait abattre en plein vol par l'ennemi, sans avoir eu le temps de réaliser qu'il était touché. Lorsqu'il reprend connaissance, il se trouve sur une île apparemment déserte, son avion détruit sur la plage, avec pour tout bagage les deux caisses qu'il transportait. Il s'agit d'une impressionnante quantité de lettres de poilus qui écrivaient presque tous à leur femme. La peur et la solitude sont souvent présents dans ces messages du front, mais aussi l'amour et le désir que ces jeunes hommes éprouvent pour leur dulcinée. Ne voyant pas en quoi ces lettres pourraient lui être utiles, il commence à organiser sa vie sur place, en construisant une cabane, en apprenant à pêcher pour se nourrir. Après des semaines de solitude et en poursuivant du gibier, Céleste va se trouver emporté par le courant d'un torrent vers une vallée dont il ne soupçonnait pas l'existence. Au bord d'un lac, il aperçoit un groupe de femmes qui se baignent en toute innocence. Il décide bien évidemment de les rejoindre. Il est aussitôt fait prisonnier et comprend qu'il se trouve sur une île peuplée uniquement de femmes...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Zanzim produit ici un album en solo qui poursuit la veine graphique déjà démontrée dans Ma vie posthume ou La sirène des pompiers. Ses personnages fins ont un côté rétro qui en fait des sortes de déclinaisons modernes des Pieds Nickelés. Des traits accentués, des situations rocambolesques racontées avec un sens aigu de l'ellipse, le style Zanzim utilise à plein une mise en page très actuelle pour gérer ses effets. Des cases nombreuses pour détailler les séquences d'action, des pleines pages inattendues qui donnent de belles bouffées d'oxygène... Il y a un impressionnant savoir-faire chez cet auteur habitué des œuvres inattendues et décalées. Le personnage de Céleste connait sur l’île aux femmes un sort totalement imprévu, qui nous conduit à une forme de réflexion sur la force des préjugés que l'on peut avoir envers des personnages trop faciles à juger. L'auteur fait sans cesse des aller-retours entre les clichés des hommes sur les femmes, et vice versa. Une sensibilité surprenante traverse l'album, une gentille moquerie pleine d'intelligence qui surprend. Et un hommage en creux aux lettres imaginaires touchantes attribuées aux poilus des tranchées, dont la poésie parfois naïve donne à ce récit une touche presque surréaliste. La cerise sur le gâteau d'un récit surprenant d'un bout à l'autre, réédité 6 ans après sa première sortie (2015), avec une couverture inédite. Un dossier spécial en fin d'ouvrage revient aussi dans cette édition sur les recherches graphiques de l'auteur.