L'histoire :
De nos jours, dans une maison de retraite, un jeune homme est dépêché pour trier les effets personnels des petits vieux sans famille. Au détour d’une étagère, il tombe sur une boîte contenant un loup. Qui peut bien se cacher derrière cet étrange accessoire de carnaval ? C’est le Chanteur sans nom. Cet étrange personnage éveille sa curiosité. Au fur et à mesure de ses recherches, il découvre la véritable identité de ce chanteur masqué : Roland Avellis. Tout commence aux Noctambules de Pigalle. C’est le clown Champi qui lui donne sa première chance. Tous les dimanches, il pousse la chansonnette. Ensuite, il enregistre ses premiers disques sous divers pseudonymes. Un jour, les dirigeants de Radio-Cité créent une émission patronnée par les apéritifs Saint-Raphaël. Tous les soirs, il interprète, à la demande, un succès du moment. Avec sa voix sirupeuse, façon Tino Rossi, il est le bel inconnu de 19h55, qui fait vibrer les cœurs féminins. Entre 1936 et 1942, il devient l’une des premières vedettes du hit-parade. Avant de sombrer, après-guerre, dans l’anonymat le plus total…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le chanteur sans nom, entre grandeur et décadence, a vécu près de mille vies. Son existence ne pouvait qu’inspirer Arnaud Le Gouëfflec. Ici, sa plume explore pleinement la personnalité de l’artiste, perdu entre une crise identitaire et une fuite perpétuelle. Son parti-pris de nous raconter son histoire à travers l’enquête d’un jeune homme (on ne peut d’ailleurs s’empêcher de penser que le jeune, c’est lui) à travers ceux qui l’ont connu. La fille du chanteur sans nom ne manque pas d’évoquer que « le plus curieux avec tous ces témoignages, c’est que malgré toutes ses escroqueries et coups pendables, tout le monde a gardé un excellent souvenir de mon père ». Cette investigation est entrecoupée de flashbacks sur les évènements marquants du chanteur. Au final, on est emporté par la narration envoûtante et onirique, dont l’atmosphère rappelle le Gainsbourg de Sfar (le fantôme du chanteur sans nom accompagne, sans relâche, le jeune homme et lui fait part de ses commentaires acerbes et tendres). En choisissant un ton léger, le scénariste rend hommage à cet artiste méconnu, mais connu pour ses chansons aux paroles pleine d’humour. Au dessin, on retrouve son complice de Topless, Olivier Balez. Son trait épais et expressif donne toute sa dimension à cette histoire exhumée. Les traits du chanteur sans nom ne sont pas sans rappeler celui du Spirit de Will Eisner. Les couleurs sont sublimes et varient selon l’époque ou se situe l’histoire (avec un grand bravo pour celles du procès du chanteur, sublimes). Cette magnifique collaboration, émouvante, mérite une place dans votre bibliothèque. Pour que le chanteur sans nom ne tombe pas dans l’oubli…