L'histoire :
1888 à Londres, Kate, une jeune prostituée, s’absente de la taverne pour rejoindre un client. Les autres filles la mettent en garde. L’éventreur rode dans les rues de Londres et plusieurs filles de joie sont passées récemment sous le fil de sa lame. Se voulant rassurante, Kate annonce que son client est une femme. Dans un parc de Londres, Kate voit une silhouette féminine toute de noir vêtue descendre les marches du petit escalier menant à un kiosque où elle se situe. Kate et la silhouette s’enlacent et s’embrassent. Un reflet argenté brille sous le rayon de lune : la lame d’un scalpel. D’un coup sec et habile, la silhouette enfonce la lame du scalpel dans la gorge de la jeune femme qui s’effondre en quelques secondes au sol. Sans perdre de temps, la silhouette ouvre le ventre de la prostituée et plonge ses mains. Le lendemain, le vendeur de journaux à la criée relate l’histoire et annonce que, comme d’habitude, les ovaires de la jeune femme ont été arrachées. Au même moment, dans la nouvelle Heliopolis, dans les Pyrénées espagnoles, Asiamar qui a 110 ans, se prépare à passer le rituel Citrinitas, l’œuvre au jaune, qui va lui permettre de vivre ses premières mille années. En cas de réussite, sa prochaine quête sera de se rendre à Londres afin d’arrêter l’éventreur.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Final en apothéose, dans un festival de couleur de la superbe série Les Chevaliers d’Héliopolis. Le lecteur suit les différentes quêtes et rituels colorés d’Asiamar, fils androgyne de louis XVI. Ce dernier opus va pousser le chevalier dans ses derniers retranchements. Il va goûter au plaisir de la vie quasi éternelle et flirter avec la folie jusqu'à douter de sa place dans la fraternité. Alejandro Jodorowsky nous livre une fin peaufinée et fluide. Le lecteur retient souvent son souffle quand il arrive à la séquence finale, de peur d’être déçu par le dénouement. Pour le coup, Jodorowsky assemble les dernières pièces du puzzle en ajoutant quelques rebondissements, en particuliers l’identité de l’éventreur et de Fuxi, le père spirituel de la fraternité. Plusieurs questions philosophiques sont posées, comme la nécessité du mécanisme de reproduction pour la survie d’une espèce ou encore le besoin de sauvegarder notre humanité alors que l’homme ne pense qu’à se détruire. Ces thèmes ne sont pas nouveaux et sont souvent mis en avant en BD, mais Jodorowsky pose les bases de la réflexion et laisse le lecteur se pencher sur ces problématiques selon sa conscience. Au niveau du dessin, Jérémy apporte tout son talent et son art pour étayer une histoire forte. Le trait est superbe, les détails nombreux et le lecteur voyage en nouvelle Héliopolis. C’est du grand Jérémy. Cerise sur le gâteau, les couleurs de Felideus sont stratosphériques et subliment le trait réaliste et précis de Jérémy. Le lecteur prendra une gifle à chaque planche. Voilà donc une superbe série qui se termine en apothéose. Quand un scénariste expérimenté rencontre un dessinateur extrêmement talentueux, cela donne un chef d’œuvre du 9ème art.