L'histoire :
En ce 7 août 1937, la riche et respectable famille Buckenham se réveille en son manoir anglais, avec les nouvelles du jour. Dans le journal, l’Allemagne nazie défraye la chronique politique… mais ce qui interpelle surtout madame Elizabeth, c’est la publication des bans du 6e mariage de sa vieille amie, Lady Fiona. Selon la rubrique mondaine, l’heureux élu serait un milliardaire qui a fait fortune en Afrique du sud. Or, ce même matin, Sir Arnold reçoit deux courriers. Dans le premier, il apprend qu’il est ruiné : ses placements sur le tunnel franco-britannique se révèlent désastreux. Il va falloir vendre le chalet en Suisse (au grand dam du fils Andrew), la villa du Touquet (au grand dam de la fille Mary), mais également leur manoir (au grand dam de la mère Elizabeth). Le second courrier leur annonce le retour au pays du grand oncle Homère, qui a fait fortune dans les mines de diamants d’Afrique du sud. Son arrivée est prévue le jour même, pour « une grande nouvelle » de vive voix ! Il n’en faut pas plus à la famille pour faire le rapprochement : Homère va se marier avec Fiona ! Or, ce faisant, les Buckenham se priveraint d’un héritage fabuleux, qui lui-même urge soudainement. Une solution radicale s’impose à chacun…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Comme l’indique le titre, ce one-shot emprunte la structure et le décorum d’une pièce de théâtre, façon Vaudeville, pour dérouler un polar à l’anglaise intentionnellement extravagant. Effectivement en un acte, en un décor unique (le manoir), l’affaire dure un laps de temps d’environ 24h (une journée et une nuit) pour une finalité jouissivement immorale. Tout part d’un meurtre cupide : soudainement ruinée, une famille décide d’anticiper l’héritage d’un richissime oncle, prétendument sur le point de se marier. Pour ce faire, chaque membre assassine l’oncle Homère à sa manière et à la queue-leu-leu, en une sorte de Cluedo caricatural à l’extrême (le pauvre tonton n’a même pas le temps d’une réplique !). Sur ce contexte déjà tarabiscoté, s’ensuivent des conséquences et enchevêtrements burlesques : débarquent le Roi d’Angleterre Georges VI en personne, ainsi que le vice-président américain Truman – alcoolique de surcroit – pour une réunion top-secrète visant à l’exfiltration d’un scientifique allemand, père de la bombe A (qui s’avèrera un espion nazi). Eh oui, l’intrigue intentionnellement fantaisiste et grandguignolesque – aux bons sens des termes – embrasse large ! Ce scénario ciselé est l’œuvre d’un duo émérite de scénaristes (Didier Convard et Eric Adam), qui aligne en sus moult répliques expressément jubilatoires. Le tout est mis en images par un auteur jusqu’alors essentiellement identifié comme coloriste-maison chez Glénat. Paul se retrouve en effet aujourd’hui au dessin, un domaine dans lequel il n’avait plus œuvré depuis une douzaine d’années. Le traitement gouaché et épais de ses planches colle à la théâtralisation et à la grandiloquence des actes. Cette sucrerie fantaisiste ravira les amateurs de polars à l’anglaise, surtout ceux qui aiment les toiles de Laura Theresa Alma-Tadema et qui ont un handicap de 11,5 au golf…