L'histoire :
Doug est un jeune noir de 20 ans. Il travaille comme manœuvre dans une scierie. On est à Kentwood, en Louisiane, en 1933. Pas de chance, ici, les noirs sont encore traités comme des esclaves, considérés comme des sous-hommes. Le Ku Klux Klan regroupe les notables et les personnalités influentes du coin et terrorise, agresse, lynche les noirs, sans crainte d’une quelconque justice. Pour avoir défendu son père agressé par le contremaître de leur patron, Sanders, Doug se fait renvoyer (en même temps que son père). Quand le KKK s’en prend à sa famille, Doug veut se faire vengeance, entrer dans une bande, devenir un hors-la-loi, aussi violent que ses bourreaux. Mais un vieux sage lui conseille de faire plutôt de la boxe. Par là, il pourra décharger son agressivité, mais aussi combattre les injustices et même devenir un héros pour les noirs, mais aussi pour les blancs. Sa rencontre avec Greg, un ancien boxeur, son vieux voisin, va faire basculer la vie de Doug. Foin de violence gratuite, il se servira de sa force pour faire de la boxe…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dès la première page, on a des frissons. Un homme noir fuit dans un bayou. Perdu dans la nuit, il est terrorisé, traqué comme une bête féroce. On pense instantanément à Dans la Chaleur de la nuit et cette chasse féroce donnée à un être humain. Le ton est donné… Les coups pleuvent sur la tête du jeune Doug, qui va devoir apprendre à maîtriser sa révolte, à la dompter, la canaliser. Pourtant, les injustices s’amoncellent pour lui, pour les siens, pour ses semblables. Son salut, il va le tenir par l’intervention de deux sages, l’un noir qui l’empêchera de commettre une erreur irréparable, et l’autre blanc, son voisin, qui lui donnera ses premiers gants de boxe, et un billet pour la ville. Le scénario de Pascal Bresson est sans accroc. Surtout, on se demande comment, en 50 pages, il arrive à raconter une histoire aussi complète, tout en se gardant de raccourcis ou de poncifs. Les dialogues, quelquefois un peu naïfs, sont clairs et collent à la période. Le dessin de René Follet est plus percutant que le gauche de Doug : à chaque case un coup de poing dans la gueule. On est vite groggy et hypnotisé par cette noirceur d’une précision incroyable et qui dégage de manière charnelle une ambiance de chaleur humaine, de travail, de jazz et de sourde violence. On a l’impression d’être avec les personnages, de sentir les odeurs, d’entendre les voix… A 83 ans, le maître Follet est toujours au top, mais a priori pour la dernière fois : le virtuose a décidé de prendre sa retraite du 9ème art. Bresson lui, continuera d’avoir des projets engagés.