L'histoire :
Dans la Londres des années 1780, la misère et la surpopulation poussent les plus pauvres à voler pour vivre. Les prisons du royaume se remplissent à une vitesse jamais connue auparavant. Parmi eux, John Hudson a à peine 9 ans, il vit dans la rue et subsiste en se faisant exploiter par un ramoneur qui l'envoie dans les cheminées des belles demeures. Quand il est reconnu coupable de vol chez un richissime bourgeois, il se retrouve dans la prison de Newgate. Il y sera bientôt rejoint par un ancien esclave noir des plantations américaines de Virginie, envoyé à Londres par les anglais, chassé par la guerre d'indépendance américaine. Caesar l'esclave et John le ramoneur vont voir leur destin lié à jamais. Pendant ce temps, le pouvoir britannique cherche de nouvelles terres de conquêtes pour remplacer l'Amérique du nord perdue. L'Afrique était jusqu'alors retenue pour les prochaines expéditions, mais un marin contacte le ministre de l'intérieur, Lord Sidney, pour lui parler d'une terre découverte par l'explorateur James Cook. A l'autre bout du monde, la Nouvelle Galles du Sud semble prometteuse. Elle offrirait une nouvelle terre fertile à l'empire britannique, en même temps qu'un exutoire inespéré pour ses prisonniers condamnés à la déportation. Il reste à trouver un gradé de la Royal Navy qui acceptera de mener onze navires de prisonniers dans une incroyable expédition, et de devenir le premier gouverneur de la nouvelle colonie. Ce sera le capitaine Arthur Phillip...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Terra Australis est le projet le plus cher de Laurent-Frédéric Bollée, passionnant à plus d'un titre. D'abord par le véritable travail d'historien qu'il a fallu fournir pour parvenir à raconter de manière crédible cette épopée fabuleuse de la fin du XVIIIème siècle. Ensuite par l'épaisseur de l'album qui en résulte : plus de 500 pages denses et captivantes, qui entremêlent avec habileté les évènements historiques et la vie des personnages. Le lecteur est autant fasciné par la dimension aventureuse de l'expédition que par la force de caractère de ses protagonistes principaux. En prenant longuement le temps de décrire Londres et ses prisons, ainsi que les discussions en haut-lieu qui aboutiront à la décision de partir coloniser une terre inconnue, l'auteur nous met parfaitement en conditions pour vivre la traversée qui s'annonce. Une tension va s'installer à mesure que les navires s'approcheront de la « Terra Australis », et chacun des personnages, prisonnier ou capitaine, va révéler le cœur de sa personnalité en mettant le pied sur la terre ferme. En livrant cette saga d'un bloc, l'éditeur fait un choix courageux mais qui s'avère parfaitement justifié, tant il réserve un grand moment de lecture. Le dessin de Philippe Nicloux, un noir et blanc expressif dans les expressions des visages et lyrique dans les paysages, est parfaitement en accord avec les textes littéraires et parfois poétiques de Bollée. De grands moments d'émotion attendent le lecteur à la découverte d'un paysage lumineux, tandis qu'il restera fasciné par les rares mais puissantes scènes de violence. Les nombreuses références historiques sont limpides et sans lourdeur. Elles s'intègrent avec naturel dans l'épopée humaine. Une mise en page avec de nombreuses planches en trois bandes horizontales permettent en outre une lecture d'une grande fluidité : on ne décroche pas de cet épais album. On le refermera d'ailleurs comme on revient d'un voyage au bout du monde, fasciné par la beauté des paysages, et dérouté par les difficultés qu'y rencontrent les hommes. Un très beau livre plein de cœur, d'énergie et de passion, qui devrait marquer l'année 2013...