L'histoire :
A Sydney, les premières colonies s'installent : 1785 pour la première, 1789 pour la deuxième, 1791 pour la troisième. L'équilibre général est précaire entre les prisonniers et les gardiens. Tous ne sont pas dans ce cas. Le botaniste David Burton attend le docteur White. Après avoir accidentellement appuyé sur la gâchette, il s'est logé une balle dans la bras. L'infection a gagné son membre, ses heures sont comptées. Ironie du sort, il ne savait pas comment cela fonctionnait. Mai 1790, William Bryant et sa compagne Mary, parents de Charlotte et d'Emmanuel fraîchement né, veulent mettre les voiles et revenir en Angleterre, malgré le fait qu'on leur a confié la responsabilité de la pêche dans la colonie. Ils se sentent prisonniers de cette terre qu'ils n'ont pas choisi. Août 1790, le capitaine Edward Edwards, marin implacable, est chargé par l'amirauté de retrouver les révoltés du Bounty qui se sont mutinés le 28 avril 1789, trois semaines après leur départ de Tahiti. Depuis, aucune trace d'eux !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
5 ans après l'immense Terra Australis, pavé graphique qui a traversé les océans pour profiter des égards australiens, le duo Laurent-Frédéric Bollée / Philippe Nicloux propose une suite (qui n'en est pas vraiment une véritablement) sur l'histoire de ces femmes et ces hommes, déportés sur des terres hostiles et habitées. N'y allons pas par quatre chemins, Terra Doloris réussit le tour de force d'être dans la même veine qualitative (voire meilleur) que son prédécesseur, qui s'attelait à relater le récit des rebuts de l'Angleterre sélectionnés pour embarquer vers l'inconnu. C'est un scénario de haute-volée ! Force est de constater qu'ici, LFB explore le devenir de ces forçats devenus colons par la force des évènements. Tous là, sans trop savoir pourquoi, mais animés par une envie de découverte, ou de retour pour certains, ou des attentes scientifiques ou politiques pour d'autres : 5 destins qui finissent par se rejoindre. Sans se laisser déborder par l'Histoire et sans filtre véritable, il s'attache à développer ces histoires (absurdes quelquefois, comme la fin malencontreuse de Burton) dans des chapitres avec son verbe dense et pertinent, signant sans doute avec ce diptyque sa meilleure oeuvre. Au dessin, Philippe Nicloux s'est une nouvelle fois attaqué à un véritable travail de forçat, avec plus de 340 planches (contre environ 500 pour Terra Doloris). Avec un tel volume, les détails ne sont pas légion, mais son trait dynamique et expressif envoie un tel souffle d'aventure, procure une telle émotion, qu'on se laisse porter par les pages. On s'y croirait et on se dit que l'on aimerait bien aller dans cette Australie pour voir de plus près ce qu'elle est devenue depuis. Un tourist-tour que les auteurs ont réellement fait dans le sillage de la sortie de Terra Australis...