L'histoire :
La première fois que Madame Suzanne a demandé à son voisin de tuer son mari, il buvait du thé de Chine avec des oranges. Le jeune homme venait juste de s’installer dans l’immeuble et Madame Suzanne savait qu’il cherchait du boulot depuis un bail et qu’il avait le moral dans les talons. Alors parfois, avant de rentrer chez lui, il était invité chez sa voisine pour prendre le thé. Un jour, elle lui a parlé de son mari. La première chose qu’elle lui a dit c’est que Monsieur Suzanne commençait à devenir gâteux, à perdre la tête et qu’elle ne voulait pas qu’il finisse comme une asperge dans une chambre d’hôpital. C’est à ce moment-là qu’elle lui a proposé de mettre fin aux jours de son mari. Il y a quelques années, le couple s’était juré que si l’un des deux montrait de sérieux signes de défaillance, l’autre ferait le nécessaire pour en finir. Mais aujourd’hui, Madame Suzanne ne peut le faire. Il s’agit juste d’aider un vieil homme à mourir dignement…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Voies off est l’un des premiers albums qui a révélé en 2006 le talentueux dessinateur Yannick Corboz (L’assassin qu’elle mérite, Le voleur d’amour, Les rivières du passé). Les éditions Glénat rééditent ce petit bijou de polar noir. Ces 10 histoires indépendantes très courtes reprennent l’essentiel des thèmes du genre : braquage, mafia, tueur à gage, assassinat, faussaires, etc. Le dénouement qui intervient systématiquement dans la dernière case de chacune de ces histoires fait mouche à chaque fois. Bien que la mécanique soit rôdée et qu’elle se répète, on n’éprouve aucune lassitude : l’effet de surprise est présent à chaque fois avec un twist original. D’un point de vue narratif, comme dans tout bon polar, le scénariste Nicolas Pothier (Ratafia, Fantomiald, Junk) a recours à une voie-off une majeure partie de l’histoire. Et c’est seulement dans les dernières cases du récit que les protagonistes s’expriment. Si Nicolas Pothier maîtrise avec brio l’art de la chute, ces histoires sombres ne sont pas dénuées d’humour noir et d’ironie, ce qui procure un vrai plaisir de lecture. Il n’y a pas que l’écriture qui soit fine et plaisante, le trait virtuose de Yannick Corboz donne à ces récits une ambiance parfaitement adaptée grâce à un découpage minutieux et des cadrages dignes du cinéma. Un petit format à découvrir ou à redécouvrir !
