L'histoire :
Dans L'usurpateur, Alvar Major accoste à Santa Margarita au moment où se joue l'exécution du gouverneur légitime, renversé par le puissant Hernando de Ibanez. Cependant, son ami Nino reconnaît ce dernier, qui n'est pas celui qu'il dit être. Quelques années auparavant, celui-ci a en effet trahi et fait tuer la bien-aimée de Nino, Ana, la livrant à un sacrifice. Il va devoir payer, mais la mort suffira-t-elle à faire oublier la peine ?...La légende des fleurs conte l'étrange destin d'un trio amoureux : Texiclan, son frère, et la belle Aka dont les deux nommés ont été transformés en fleur par un dieu jaloux. Chacune au bord du même lac, mais l'une du soir et l'autre du jour, ne pouvant donc toutes deux jamais se voir. Alvar Mayor, missionné par le frère : Untzlan, part au cœur de la forêt afin de tuer le dieu sorcier. Dans Miroirs, Le Prix, et surtout Les trois morts d'Alvar Mayor, notre héros accompagne le destin de connaissances, ou affronte directement le sien, se voyant conter son passé, son avenir, jusqu’à ses trois morts possibles...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Autant la découverte de cette série – qui n'avait jamais été publiée ailleurs qu'en Italie où en Argentine – a permis de se familiariser dans le premier tome avec la poésie et l'existentialisme d'un héros, assez proche, dans une certaine mesure, du marin vénitien d’Hugo Pratt, autant ces 18 « nouveaux » récits nous emportent un peu plus loin dans la réflexion philosophique et la psyché de celui-ci. Cela aboutit à une série de chapitres moins nerveux, où l'aventure pure cède la place à des introspections sur le thème du regret, de destins contrariés, de condamnations injustes, de désirs de vengeance, de lâcheté aussi. Alvar Mayor, qui était pleinement acteur dans le précédent tome, se retrouve dans celui-ci à subir les affres d'un destin souvent malheureux, voire injuste, trimballant sa grande silhouette comme une marionnette agitée par des forces moqueuses. Le pire étant sans doute son amour impossible avec la belle Lucia, que l'on retrouve au début (Le Prix) et à la fin du volume (Les trois morts d'Alvar Mayor III). Si le dessin d'Enrique Breccia reste prodigieusement magnifique, avec des passages « rêvés » encore plus remarquables, contenant moins d'aplats et davantage de hachures, on quitte cette lecture avec l'étrange sensation de suivre un personnage un peu moins incarné, mais une création d'un duo d'auteurs en tous les cas exceptionnelle. Spéciale dédicace à Mike Mignola, dont l'épisode d'Hellboy : le cadavre (1995) pourrait avoir été inspiré par celui de ce chroniqueur des Indes (dans Le Cercueil), traînant sa défunte bien-aimée dans une boîte en bois, cherchant la rivière magique pouvant la ramener à la vie. Cette série à découvrir et méditer connait très peu d'équivalents.