L'histoire :
Dans son village du Kongo, en 1685, la jeune Lukeni prépare son balluchon. Sa grand-mère lui a en effet promis de l’emmener pour une longue promenade initiatique de 2 jours, à pieds vers l’intérieur des terres. Lukemi est surtout impatiente d’entendre la suite de l’histoire de l’enfance de sa grand-mère Nzinga. Ce à quoi s’emploie effectivement la grand-mère, tout en marchant. Jadis, alors qu’elle avait l’âge de Lukemi, elle avait été enlevée parmi d’autres africains et emmenée à travers l’océan, jusqu’à l’île de Yanacouaera (actuelle Martinique). Elle s’était alors faite appelée « Pacotille », car c’est ce terme qui était employé pour désigner la monnaie d’échange. Forcée de travailler chaque jour jusqu’à l’épuisement, elle avait participé à un mouvement de rébellion. Elle avait réussi à s’échapper à bord de barques, en compagnie d’autres esclaves. Elle avait sympathisé avec un garçon un peu plus âgé qu’elle, appelé Kali. Les barques avaient fini par rejoindre l’île de Wai’tu Kubuli (actuelle Dominique). Ils avaient alors été accueillis par un chef plutôt affable, Oukale. Mais les enfants de la tribu étaient nettement plus revêches à leur encontre. Kali et Pacotille avaient alors été providentiellement sauvés par un jeune prêtre, établi là pour évangéliser et éduquer les sauvages…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le scénariste Corbeyran et la journaliste Aurélie Bambuck poursuivent leur histoire de l’émancipation des esclaves, à l’attention des jeunes lecteurs. Les aventures initiatiques de Pacotille, fillette africaine déracinée pour être exploitée aux caraïbes, au XVIIème siècle, sembleront certes « gentiment » amenées et un peu téléphonées pour les gros lecteurs de BD… Mais il était difficile de pousser la cruauté dans ses retranchements les plus atrocement authentiques, au regard du lectorat visé. L’horreur culmine donc avec la marque au fer rouge d’une fleur de lys sur le mollet. Pour le reste, on peut faire confiance en Corbeyran pour que la narration soit impeccablement séquencée et les personnages attachants. Le dessin réaliste et encré d’Olivier Berlion se conforme lui aussi à cette ambiance jeunesse, avec des couleurs lumineuses et contrastées de Christian Favrelle, qui font la part-belle à la luxuriance végétale des tropiques. Le dessinateur renoue légèrement avec le ton de ses Sales mioches, avec aussi un gros clin d’œil à son Tony Corso à travers le personnage du père Bernard, un clone du détective tropézien, mais en soutane. Aurélie Bambuck poursuit ainsi l’œuvre mémorielle entamée par son père (l’athlète Roger Bambuck, médaillé d’or aux JO 1968).
