L'histoire :
Jacques est appelé par le conseil de révision pour intégrer l'armée. Mais il est réformé à cause de sa polythélie : le bougre a quatre tétons ! Ouvrier aux chantiers de Bordeaux Bacalan, il construit des cargos. Encore insouciant et passionné de BD, il part avec son frère Marceau et des amis vers Pyla-plage, le temps des vacances d'été. C'est que le travail à l'usine n'est guère passionnant : entre les bruits sourds et la colle dans le nez, mieux vaut s'enfermer dans une bulle pour tenir la cadence. Pour échapper au quotidien, il lui arrive aussi de se rendre sur les bords du lac de Cazaux, là où l'oncle Raoul a des projets d'achat immobilier. Entre rudesse du travail et petits moments de repos, Jacques et Marceau découvrent et expérimentent la vie. Jusqu'au jour où un certain Hitler envahit la Pologne et met l'Europe à feu et à sang. Le temps de l'Occupation est arrivé...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans cette suite des Mémoires d'avant-guerre, Bruno Loth met en images différents moments de la vie de son père Jacques, au coeur de la cité bordelaise entre le chantier naval, un logement de fortune et des virées en bord de mer, le tout sur fond de Seconde Guerre mondiale naissante. Période marquante pour Jacques Loth, son fils Bruno se charge ici de photographier la France de début de guerre, entre la fin de la guerre d'Espagne et le début de l'Occupation nazie. L'auteur s'attarde sur les faits, ni plus ni moins, en croisant la grande Histoire – celle des stratégies impérialistes – et la petite histoire – celle d'un vécu au quotidien dans la ville de Bordeaux. On plonge dans cette ambiance faite d'incertitudes, de douleurs, d'angoisses, mais aussi de parenthèses enchantées en bord de littoral. L'auteur narrant les expériences de son père entre premiers émois, rationnement, portrait de l'industrie, Résistance et perte des êtres chers... Sans effet spectaculaire et débarrassé de tout pathos, l’ensemble se lit agréablement, même si l'absence d'un traitement plus ambitieux déçoit un peu. L'angle narratif choisi, celui de la simple énumération factuelle, conjugué à un récit souvent trop neutre ou en retrait, ne permet pas de nous captiver réellement. Reste toutefois le sincère et authentique témoignage d’un contexte socio-historique particulier. Le dessin, plutôt élégant, se met quant à lui au diapason d'une colorisation judicieusement atténuée, aux tons gris et mélancoliques. Au final, un travail de mémoire documenté et intéressant, pour qui veut entrer dans le quotidien d'individus sous l'Occupation. A suivre dans le second et dernier tome.