L'histoire :
Début septembre 1944, les forces armées américaines libèrent la Belgique de l’occupant allemand. La chasse au collabo commence aussitôt. Alice n’échappe pas au châtiment public et honteux de la tonsure : son mari Charles était réputé être un fervent partisan de Léon Degrelle, fondateur du mouvement Rex, allié avec le parti nazi. Accueillie à la gare par Thomas et Rose, elle revient à la Goffe avec le crâne rasée, très affligée, et s’enferme dans un profond mutisme. En plus de son humiliation, elle s’inquiète pour Charles car personne ne sait où il peut être. En outre, elle ne pardonne pas à Thomas de ne s’être jamais engagé, ni chez les résistants, ni côté collabos. Son hôtel des Roches, en revanche, se transforme en véritable QG retranché pour les GI américains. Même Lucie, la petite sœur du curé Joseph, reconvertie en infirmière, fricote avec un beau chirurgien militaire. Joseph, lui, se remet lentement de ses derniers jours de captivité. Résistant de la première heure, il a été torturé et son visage tuméfié peine à retrouver un aspect normal. Malgré sa neutralité et sa philosophie cynique, Thomas n’est pas épargné par l’époque. Il pleure Assunta disparue, s’inquiète pour son frère et comprend qu’il a définitivement perdu Alice…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour la deuxième partie de cette chronique historique, on s’attendait à suivre la tournure de la relation sentimentale compliquée entre Alice et les deux frères Deschamps, au moment même où on les avait quitté : au tout début du second conflit mondial (1939). Surprise : le récit fait une ellipse de presque 5 ans (toute la durée de l’occupation) et reprend en 1944, juste à la libération de la Belgique par les forces américaines. L’ambiance est donc aux règlements de compte entre collabos et résistants, ainsi qu’aux tonsures pour les femmes ayant fricoté avec l’ennemi. Les inséparables auteurs belges Eric Warnauts et Guy Raives ont ici choisi de s’intéresser, sur un plan global, aux conséquences sociales de la guerre, et à travers un plan plus resserré, aux séquelles psychologiques et sentimentales sur les protagonistes. A l’image des infrastructures civiles, tous ont souffert. Blessures physiques ou morales, voire disparitions pour deux d’entre eux… Plus rien ne sera jamais comme avant. Brutalisées par les évènements, les personnalités ont changé et c’est là le cœur du sujet de ce diptyque. Ce faisant, Warnauts et Raives livrent aussi une peinture historique fine et réaliste de cette époque troublée dans les Ardennes belges. Leur dessin conjoint, une griffe réaliste rehaussée d’une colorisation à l’aquarelle, demeure d’une belle facture, très agréable à l’œil, malgré des visages féminins qui tendent à se confondre.