L'histoire :
Nice, début des années 1920. Dans un immeuble du quartier des Musiciens, vit la famille Jacob : André, architecte, formé aux Beaux-Arts et lauréat du second Grand Prix de Rome, son épouse Yvonne Steinmetz, chimiste de formation devenue mère au foyer, et bientôt leurs trois filles : Madeleine, Denise et Simone. Le couple s’est marié le 22 mai 1922 dans la plus stricte intimité. C’est une famille cultivée, laïque et aimante. André, d’origine alsacienne, a un caractère rigoureux et un profond attachement à la raison ; Yvonne, issue d’un milieu plus modeste, est une femme douce et très belle, totalement dévouée à ses enfants. Les Jacob mènent une vie paisible et harmonieuse à Nice. L’été, ils partent à La Ciotat dans une maison familiale, entre baignades, jeux de plage et moments partagés. Ils rendent souvent visite à la famille Weissmann, dans l’Oise. L’éducation des filles est soignée : curiosité, indépendance d’esprit, attachement à la culture et au savoir. Mais la crise économique de 1929 bouleverse la situation : les chantiers d’architecture se raréfient, les revenus diminuent et la famille quitte le centre de Nice pour un logement plus modeste. Dans le même temps, la montée du nazisme en Allemagne, les discours sur la pureté raciale et les premières persécutions des Juifs inquiètent sans encore bouleverser leur quotidien. Chez les Jacob, on évite la politique, André étant plutôt à droite, Yvonne à gauche... mais le monde, autour d’eux, commence lentement à basculer.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Adaptée du film documentaire Simone, les sœurs de l’ombre réalisé par David Teboul en 2022, Les Sœurs Jacob raconte l’histoire d’une famille aussi unie que marquée par le siècle. Car si tous les Français connaissent Simone Veil – la ministre, la survivante, la femme entrée au Panthéon – peu savent qu’elle fut d’abord Simone Jacob, la benjamine d’une fratrie profondément soudée, vivant à Nice dans les années 1920. Une famille laïque, cultivée, aimante, incarnée par un père architecte, André Jacob, et une mère d’une beauté lumineuse, Yvonne, qui consacra sa vie à ses enfants. Fred Bernard signe ici un récit ample et bouleversant, nourri par l’écriture sensible de Marine Desplechin, qui transpose avec justesse l’émotion du documentaire. On y retrouve la lumière de la Côte d’Azur, les rires d’enfance, puis la lente dérive vers l’ombre : la montée du nazisme, la déportation, la perte, la survie. Le dessin, sobre et expressif, épouse ce mouvement – de la douceur pastel des débuts à la gravité des dernières pages. Mais au-delà du drame historique, Les Sœurs Jacob parle d’amour entre sœurs liées comme les cinq doigts de la main, de mémoire pour ne pas oublier, de résilience pour changer les choses. À travers le regard de Simone et de ses sœurs, l’album fait revivre un monde balayé par la barbarie, et rappelle que derrière le symbole de Simone Veil, il y avait d’abord une jeune fille, une sœur, une enfant.