L'histoire :
Fin des années 70, aéroport de Rome, 15h34. Deux israéliens sont repérés par les services secrets américains, qui déclenchent une opération d’élimination radicale. En plein hall, au milieu des centaines de touristes, ce sont des japonais qui sont les exécuteurs… avant d’être eux-mêmes victimes d’un mitraillage qui vire au carnage. D’innocents civils sont victimes de balles perdues, dont une fillette. Bref, c’est un sacré beau bordel… dont réchappe miraculeusement une jeune femme rousse, une étudiante américaine, qui voyageait avec les israéliens, Hannah Stern. Celle-ci passe entre les mailles du filet des agents de la CIA qui ont géré l’opération comme des cow-boys. Elle parvient tranquillement à prendre l’avion pour Pau. Puis une fois au pays basque, elle se rend à pied, comme une simple randonneuse, jusqu’au château d’Etchebar, dont le propriétaire est un certain Nicholaï Hel. Elle dénote quelque peu parmi les autochtones, en raison de son short très court et de sa dégaine de bimbo. Au terme de sa promenade champêtre, Hannah est aimablement accueillie par une jeune femme d’une grande beauté, une japonaise prénommée elle aussi Hana, qui se présente comme la concubine de Nicholaï Hel, alors absent. Au même moment, les services secrets américains comprennent qu’ils sont dans la merde. Car si Hannah convainc un tueur professionnel de la trempe de Hel de se joindre à sa cause, ça va tourner au cataclysme…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cet épais thriller d’espionnage de plus de 200 pages est l’adaptation d’un roman de l’écrivain américain Trevanian (de son vrai nom Rodney William Whitaker), publié en 1979. Au centre de son récit, celui-ci place un personnage à la fois héroïque et sulfureux, d’une aura hors norme : un tueur professionnel désabusé, débarrassé de tout sentimentalisme, à la fois d’une grande acuité sur les contrats qu’on lui soumet et d’une puissance de séduction souveraine sur la gente féminine. Ce super James Bond au look du chanteur de The Verve ne lutte pas contre des super-méchants mégalomanes aux moyens financiers illimités avec des gadgets rocambolesques, mais il vit sagement sa pré-retraite, reculé dans son château du pays basque et le faste que lui permettent ses tarifs. Où il tente d’atteindre un état mental de totale maîtrise de soi et du monde qui l’entoure, le fameux Shibumi du titre. L’adaptation de Pat Perna prend le temps de le présenter aux lecteurs, s’intéressant prioritairement à un acte terroriste : une exécution sale au milieu d’un aéroport. Cette introduction musclée met aussi en scène un personnage féminin tout aussi séduisant, quoi que plus ingénue (et affriolant dans son petit short), Hannah Stern. La belle rousse est une activiste israélienne et elle tente de s’adjoindre l’aide de Hel, l’incarnation du mâle alpha, plus fort à lui tout seul que tous les services secrets du monde réunis. A l’instar du roman originel, Perna accorde un riche passé à Nicholaï Hel et décrit le périmètre d’espionnage dans lequel il va être mêlé, proche des attentats aux JO de Munich (nous sommes dans le même contexte temporel, à la fin des seventies). Le dessinateur Jean-Baptiste Hostache déroule une griffe semi-réaliste maîtrisée et parfaitement appropriée au registre… et il a le grand mérite d’avoir tenu un style cohérent tout au long de 200 planches ! Entre quelques rares scènes d’action et fusillades, il s‘agit essentiellement de donner du rythme aux palabres, sur fond d’ambiances toujours très tendues. Au final, cette BD d’espionnage est un peu longuette à avaler, mais elle sort clairement des sentiers battus, se déroulant, en contrepied du genre, dans la cambrousse du pays basque !
