L'histoire :
Quand elle est petite fille, Rojîn assiste souvent aux engueulades de ses parents – son papa est kurde, sa maman française. En 2014, alors qu’elle a tout juste 18 ans, elle se retrouve mariée de force à un turc, Issa. Et toute la famille de ce dernier le pousse à profiter ostensiblement de sa nuit de noce, la défloraison rituelle… Mais Rojîn ne compte pas se laisser faire. Une fois seule avec Issa, elle l’assomme avec sa bouteille de Raki et prend la fuite. Elle saute par la fenêtre du premier étage et court à en perdre haleine dans les rues de Paris, par une nuit d’orage. Eperdue, trempée, elle fait une pause sur un banc public en face de la colonne de juillet, place de la Bastille. Elle jette son alliance, qui atterrit aux pieds d’un homme lui aussi désespéré. Journaliste, Olivier sort de l’hôpital où il vient d’assister à la mort de sa femme, après trois ans de coma. Celle-ci a été victime d’un attentat islamiste à Marrakech. De par sa profession, Olivier connait bien la problématique des kurdes. Il recueille Rojîn chez lui, en tout bien tout honneur. Durant quelques semaines, ils apprennent à se connaître. Rojîn lui raconte son histoire personnelle, tout aussi tragique que celle de son peuple…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Il ne fait pas bon naître kurde, et encore moins femme kurde. Ce peuple sans nation est tiraillé entre trois pays qui les oppriment : l’Irak, la Syrie et la Turquie… et ne recueille que très peu de soutien de la communauté internationale. La scénariste turque Kudret Gunes – d’origine kurde ! – propose dans ce roman graphique de près de 160 pages un tour certes fictionnel, mais relativement exhaustif, de la violence à laquelle sont confrontées les femmes kurdes, aujourd’hui, au XXIème siècle ! Son personnage central de Rojîn née en France est d’abord mariée de force. Puis traquée, elle retourne en Turquie en quête de ses origines ethniques. Arrêtée pour un faux prétexte par la police turque, elle est torturée, violée et finit par rejoindre les rangs des femmes soldats qui combattent à Kobané en 2014 contre l’état islamique. Et alors qu’on pensait le pire passé, elle tombe entre les mains des fanatiques où elle subit des brimades encore pire… Et elle finit comme esclave sexuelle vendue à un vieux calife libidineux, avant de s’évader, de revenir en France où elle est une nouvelle fois traquée à mort par des décervelés fanatiques. La scénariste a certes chargé la barque sur une seule personne, au destin aussi héroïque que rocambolesque… Mais toutes ces facettes de la condition kurde sont réelles dans un contexte authentique. L’ensemble est très professionnellement dessiné par Christophe Girard, avec des personnages semi-réalistes expressifs et attachants, dans un cadre documenté.
