L'histoire :
Chadia est maman de deux filles, aujourd'hui adolescentes. L'une d'elles lui demande l'âge qu'elle avait sur la photo d'un album souvenirs. Chadia lui répond 19 ans : cette photo date du jour des résultats de son baccalauréat. Son autre fille remarque qu'elle est habillée à la mode d'aujourd'hui ! Chadia répond qu'effectivement, son look ressemble à celui des jeunes de maintenant... Le crop top en moins. Car elle n'avait pas le droit d'en porter, à l'époque, ses parents lui interdisaient. Sa fille réagit : mais, pour quelles raisons ? Elle aurait dû être libre de choisir la manière dont elle voulait s'habiller ! Chadia commence à se livrer, à raconter son histoire intime et personnelle, celle de la relation qu'elle entretenait avec ses parents. Ils pensaient qu'elle ne pourrait faire ses propres choix qu'une fois mariée, sous la tutelle de son mari. Jusque-là, elle devait leur obéir au doigt et à l'œil. Chadia a alors contourné le système, elle a mis en place des stratégies pour échapper au contrôle permanent et à la répression de ses parents. Quelque chose l'énervait au plus haut point : dans cette famille de 12 enfants, les filles et les garçons n'étaient pas placés sur un pied d'égalité par leur mère : les filles étaient surveillées et devaient aider pour les tâches ménagères, tandis que les garçons avaient du temps libre devant eux, car ils n'avaient pas les mêmes obligations...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Chadia Chaibi Loueslati, autrice de Famille nombreuse et de Vacances au bled, s'attaque à un nouveau sacré sujet. Elle aborde ici son parcours personnel, en se plaçant en tant que narratrice qui évoque son passé avec ses deux filles adolescentes. Elle se confie sur les inégalités importantes installées entre ses parents et ses frères et sœurs. Sa mère notamment, n'a jamais traité de la même manière ses filles et ses garçons. Et Chadia en a beaucoup souffert : elle subissait des interdictions permanentes et injustifiées, devait mettre en place des stratégies pour échapper à la surveillance de sa mère et faire les choses qu'elle aimait. Elle devait se censurer et effectuer les corvées, les tâches ménagères. Pendant que ses frères jouaient à la console et étaient libres, eux. Depuis l'enfance, ce déséquilibre ne lui convient pas. Elle aspire à une seule chose : la liberté, l'égalité et l'émancipation. Pour accéder à ce rêve, elle va se battre et se rebeller, avec violence. Le récit est dur, et nous fait prendre pleinement conscience du système familial oppressif et répressif, mais surtout inégalitaire, dans lequel s'est trouvée l'autrice dans sa jeunesse. C'est à la fois un combat teinté d'espoir, et en même temps, un quotidien parfois accablant et démoralisant. L'autrice fait aussi le parallèle avec la propre éducation qu'elle a voulu transmettre à ses filles. Pour mettre en images son texte, elle a opté pour une colorisation réaliste sur les passages contemporains, et une bichromie noire et rose pour le passé. Ce choix colorimétrique est en adéquation avec le regard de son entourage, teinté de sexisme, et qui malheureusement ne lui fait pas voir... la vie en rose.
