L'histoire :
Dans la savane, sur une branche large d’un arbre mort, une maman léopard met au monde un petit léopard. Emplie d’amour, elle le nettoie, puis elle l’installe en sécurité, dans une anfractuosité de l’arbre. Elle part ensuite à la chasse pour le nourrir. Elle espère trouver une gazelle, un lapin, un gnou ou un phacochère… Elle découvre finalement une colonie de babouins. Tapie sur elle-même dans les hautes herbes, elle met discrètement son dévolu sur une femelle, la plus accessible. En un claquement de doigt, elle l’a chopée dans sa gueule et tuée. Elle rapporte sa proie à son nouveau-né, mais elle le découvre alors… mort. Le bébé n’a simplement pas survécu à ses premières heures, comme cela arrive parfois. La maman léopard est profondément affligée, en colère contre cette fatalité. Soudain, elle entend avec stupeur un braillement de bébé. Il provient de la dépouille de la femelle babouin ! Quelques minutes après sa mort, sa proie vient de mettre bas à un bébé ! Le bébé la regarde comme si elle était sa maman. Il cherche à téter ses mamelons pleins de lait. La maman léopard le laisse faire et décide de faire son report affectif sur ce bébé babouin. Elle jette au pied de son arbre la petite dépouille de son bébé mort-né et elle installe le petit babouin à sa place. Elle le ravitaillera, le couvrira de son affection, jouera avec lui, l’éduquera… Quelques mois après cet épisode, le fils a bien grandi et il est devenu un chasseur aguerri…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Baboon se présente comme une fable animalière muette, mais néanmoins pleine d’aventures, de tendresse, de leçons de vie, le tout obéissant à une narration parfaitement limpide. Cela commence à la manière du Livre de la jungle de Kipling, mais dans ce qui ressemble à la savane africaine : une femelle rendue malheureuse par sa maternité morbide prend en charge l’éducation et l’affection d’une espèce radicalement différente de la sienne. Or ici, ni loup, ni panthère noire, ni petit d’homme. Une léoparde devient mère d’un babouin. La chasseuse adopte la progéniture de sa proie. Évidemment, la morphologie du babouin limite grandement ses facultés de chasse, comparativement à la machine à tuer qui caractérise le léopard… Mais qu’importe : le volontarisme en duo suffit à contenter cet étrange binôme, du moins au départ. Sans trop en raconter, la suite de l’album confronte évidemment notre babouin-léopard à ses limites et l’invite à faire preuve de dépassement. Ce récit fonctionne surtout parce que le dessin de son auteur, Pau (comme la ville), se montre d’une grande souplesse. L’artiste espagnol conjugue le réalisme animalier avec une expressivité caricaturale de l’anthropomorphisme, sans que cela ne choque jamais. La profondeur des cadrages et le découpage séquentiel très dynamique, notamment lors des attaques de léopards (ex : l’angle en p.13), génèrent et optimisent la tension nécessaire. Et tant pis si la happy-end transige avec la réalité d’ordinaire cruelle : petits et grands auront vibré dans la savane africaine avec cet attachant Baboon.