L'histoire :
A 54 reprises, la créature jaune mesquine et hypocrite Focu s’adresse à ses interlocuteurs de deux manières. A gauche, il émet un jugement tranchant et honnête (ex : « T’as vraiment un cul de péniche »). A droite, il tourne la chose différemment afin de se foutre de la trogne de sons vis-à-vis sans qu’il s’en aperçoive (Ex : « J’ai l’impression de t’avoir déjà croisé le long du canal »). Ainsi, tu ne diras pas « T’as des croûtes plein la gueule », mais « Photographiquement, tu dois super bien accrocher la lumière ». Tu ne diras pas « Elle est super démodée ta veste » mais « Y’a pas à dire, ils savaient bosser, à l’époque ». Etc.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le bien-nommé personnage de Focu, de forme animalière jaune improbable, a été inventé il y a déjà bien longtemps par Diego Arénéga (en 1999 !). Depuis, le personnage « faux-cul » a vécu au travers deux recueils de gags et un hors-série (tous parus entre 2002 et 2004), mettant en scène l’empereur des hypocrites dans toute sa splendeur – c’est sa spécialité à lui. Dix ans plus tard, coucou le revoilà, dans un petit bouquin carré (12x12 cm) qui n’est autre qu’une resucée partielle du hors-série Les 110 commandements. 54 commandements sont en effet ici présentés à travers un dessin et une mise en situation minimalistes. Sur la page de gauche, Focu émet un jugement féroce sur son interlocuteur : qui pue de la gueule, qui est moche, gros, ou qui a un truc social qui cloche avec la norme. Sur la page de droite, Focu l’exprime différemment, toujours face au même interlocuteur, à travers une réflexion politiquement correcte et pétrie d’ironie. La substantifique moelle humoristique se trouve précisément dans le raccourci de pensées variablement culotté imaginé par Aranega. Ces fulgurances de l’esprit sont assez bien senties, souvent drôles, à défaut d’être essentielles. Tout a surtout déjà été dit, puisqu’il s’agit là d’une réédition qui ne dit pas son nom.