L'histoire :
Un matin sur la plage, un étranger s’est adressé à André et Pierre : impossible de savoir ce qu’il a bien pu leur raconter. Toujours est-il que les deux frères ont tout abandonné pour le suivre. En colère, inquiet et décidé à ne pas se séparer de quatre bras costauds et habiles à manier les filets de pêche, Jonas, leur père, leur emboite le pas pour les ramener à la maison. Sur sa route, il croise deux autres pères, Simon (le papa de Judas) et Alphée (celui de Mathieu), qui partagent avec lui inquiétudes et besoins de comprendre. Dans leur périple, les paternels font toujours choux blancs : point de retrouvailles avec les fistons. Ils doivent se contenter, alors, des récits qu’on leur fait des exploits de cet inconnu que l’on nomme Jésus et qui, outre porter la bonne parole, fait des miracles à tour de bras. Si Alphée se laisse peu à peu séduire au cours du voyage, au point d’embrasser cette nouvelle religion, il en faut plus à Jonas. Ce n’est pas une visite guidée (n’oubliez pas le guide !) sur les lieux où ce soi-disant prophète a marché sur les eaux, qui pourra le convaincre (il y a forcément un truc…). Aussi lorsqu’on lui indique l’endroit où trouver une association anti-Jésus en ville, notre homme jubile : groupe de paroles pour ce défaire de la Jésus-addiction ; réajustement spirituel ; marches silencieuses et soutien psychologique à un aveugle ayant, par le prophète, recouvré la vue pour découvrir l’abominable visage de sa femme ! Mais tout ça ne change rien : les fistons avancent vers Jérusalem, ce qui risque fort de causer encore moult soucis aux papas…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Si vous vous êtes lassés des récits à énigmes, des mystères à tiroirs et des sociétés secrètes qui, dans l’ombre, préservent le mensonge historique autour de la vie de Jésus, prenez les deux premiers albums du Voyage des pères sous votre bras. Attention, n’espérez pas y trouver la moindre once de parodie cherchant à ridiculiser le début du christianisme en un brûlot anti-catho : David Ratte est bien plus malin que ça. Car s’il manie toujours avec un bonheur égal l’humour décapant, c’est bien de la véritable histoire du Christ dont il est ici question. Documenté et crédible, son récit se démarque uniquement par l’angle génial qu’il a choisi d’utiliser : détourner la caméra du ou des héros hyper connus, pour focaliser sur les pères de 3 des apôtres lésés par l’endoctrinement des fistons (eh oui, après tout, ils avaient bien une vie avant Jésus. Comment la famille a-telle bien pu réagir ?). Cette « caméra » mobile, offre également au scénariste-dessinateur un terrain de jeu vaste et jouissif, lui permettant, par exemple, de s’amuser à imaginer les dommages collatéraux provoqués par les miracles : aveugle retrouvant la vue ou transfert des démons dans un troupeau de 2000 porcs… La palme des trouvailles reste le personnage de Jonas, dont le caractère trempé permet à David Ratte de servir des répliques savoureuses et imagées. L’effet de surprise liée à cette inventive narration ayant été digéré avec le tome 1, cet opus se veut moins surprenant. Porté par un Jonas qui écrase de sa personnalité le récit (et pourtant ce 2e chapitre à pour titre Alphée), le scénario manque un peu d’épaisseur. Nul doute que le prochain et dernier chapitre corrigera le tir : le cliffhanger final en est une belle promesse en tout cas…