L'histoire :
En mars 1690, en Martinique, de nombreux esclaves caribéens préfèrent se suicider en groupe du haut d’une falaise plutôt que de continuer à être exploités par les propriétaires terriens français. Philippe d’Audoin, propriétaire d’une exploitation de cannes à sucre, est furieux de cette situation. La compagnie de Guinée avec laquelle il travaille et écoule son sucre, lui demande sans cesse plus de production pour exporter vers le royaume de France. Or sans cette main d’œuvre, il ne peut plus couper ses cannes. De fait, il écrit une lettre à Versailles afin de demander au roi plus d’esclaves. Quelques temps plus tard, au port de la Rochelle, un jeune homme, Jean Rouen, se tient prêt à embarquer pour la Martinique. Sur le quai, il fait la connaissance du père Labat, prêtre et botaniste à ses heures, qui se rend lui aussi dans les Antilles françaises. Ils vont naviguer sur le même bateau et ainsi faire plus ample connaissance. Le père Labat apprend que Jean est « un 36 mois », une personne qui s’engage pour trois ans auprès d’un propriétaire terrien en étant corvéable à merci. Au bout des trois années accomplies, il doit obtenir un lopin de terre avec lequel il souhaite rembourser ses dettes et celles de son père…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Tristan Roulot et Mateo Guerrero présentent ici le premier tome d'une nouvelle aventure consacrée à la boisson des îles, le rhum – qu'on peut aussi appeler tafia ou eau de vie. Cet épisode pilote immerge le lecteur au XVIIème siècle et relate les péripéties de deux personnages partis pour la Martinique. L’un est le prêtre Jean Labat et l’autre, un jeune homme endetté, Jean Rouen, bien déterminé à faire fortune. Au travers de leurs aventures dans cette île des Antilles, ils vont évoluer au cœur de la fabrication du sucre de cannes et, accessoirement, de celle du rhum, boisson à l’époque pas distillée, au goût infect, et seulement réservée aux esclaves. Ce gros sirop va susciter l’intérêt du prêtre qui y trouve une panacée contre la maladie de Siam. Le scénariste fait une approche historique de cette boisson alcoolisée, au travers de sa découverte, mais surtout de son amélioration grâce à la distillation. Il montre aussi toute la dimension tragique de l’esclavagisme, les conditions de vie misérables des « marrons », mais aussi la volonté de s’en sortir au travers du personnage de Jean Rouen, blanc et esclave pour trois ans, au service d’un bourreau. Le dessin de Matéo Guerrero retranscrit parfaitement le récit. L'espagnol use d’un trait réaliste dynamique et précis, aux décors bien fournis. Ce premier volume, d’une série prévue en quatre tomes, consacrés au rhum, est une mise en bouche plutôt réussie, qui plaira aux fans du genre, amateurs d’Histoire et... de rhum.
