L'histoire :
L'hiver est calme en cette épiphanie de l'année 1412. En pleine panique, Jacques sort de chez lui en trombe et traverse le village à toutes jambes. Il dérange le prêtre en pleine messe : sa femme est en train d'accoucher. C'est une fille, baptisée Jeanne dans les semaines qui suivent. En ces temps de guerre, le Jacques aurait certes préféré un garçon... Gaie de tempérament, la fillette grandit, s'épanouit et assume rapidement la besogne de bergère. Les temps sont pourtant tristes : la nouvelle du traité signé par le roi Charles VI est arrivée jusqu'au village. Cet accord stipule que la couronne de France ira au roi d'Angleterre à la mort du souverain. Seigneurs bourguignons et armagnacs profitent de ce contexte tourmenté pour assoir plus encore leur tyrannie sur le monde paysan. Rackets odieux et pillages félons sont courants et instrumentalisés pour servir les intérêts et les exactions de chacun des deux camps. Et pourtant, la vie doit bien continuer pour les petites gens. Très pieuse, la petite Jeanne devient adolescente et s'imprègne toute entière des sermons du prêtre. L'on parle notamment d'une prophétie, qui verrait un chef de guerre et de paix les libérer du joug de leurs oppresseurs. Et puis un jour, tandis qu'elle garde les cochons en priant de toute son âme pour l'avènement de ce chef, l'archange Gabriel lui apparait. Puis Sainte Catherine et Sainte Marguerite la contactent directement pour lui annoncer que son voeu sera exaucé : ce sera elle, le chef tant attendu ! Jeanne s'indigne, ce doit être une moquerie...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Comme son titre l'indique et puisque nous fêtons en 2012 les 600 ans de sa naissance, cette nouvelle série historique (et un brin ésotérique) narre de la manière la plus traditionnelle possible l'histoire de Jeanne d'Arc, figure médiévale des plus célèbre de l'Histoire de France. Authentique et mystérieuse, l'extraordinaire réussite de Jeanne a eu en effet le mérite de réunir les piliers de la société de l'époque : le monde paysan, le religieux, le politique et le guerrier. Son tragique destin crématoire en a fait une martyre très puissante, fondateur par la suite du patriotisme français. Philosophe et théologien, Fabrice Hadjaj présente la chose sous le prisme divin, dans le pur respect de la légende populaire – a contrario de la version de Valérie Mangin, qui a pris le parti culotté et satanique, dans sa Jeanne d'Arc, de présenter l'héroïne de la Nation comme une vraie sorcière ! Dans ce premier tome, on découvre donc le contexte de la guerre de 100 ans, l'enfance de Jeanne et les raisons de sa dévotion. Jusqu'au fameux « contact divin » qui l'amène à se mobiliser pour la couronne de France. Peu bavard en dialogues et en voix-off, le récit d'Hadjaj laisse une grande place à la narration visuelle de Jean-François Cellier. Le dessinateur montre en effet un joli coup de crayon réaliste, à la fois doux et précis. Il insiste dans sa colorisation sur l'atmosphère austère du monde paysan, admirablement rendue. Via de bien jolies planches, il utilise aussi souvent de larges et belles cases, jouant parfois de pleine verticalité. Cet épisode pilote d'une trilogie programmée demeure peut-être juste trop « sage » pour être pleinement emballant...
