L'histoire :
Quelque part au dessus de la campagne française, durant la Première Guerre Mondiale. Deux biplans virevoltent dans les airs. Le Fokker Rouge du Baron Rouge a pris en chasse le Spad qu'un pilote français manie habilement. Cela fait dix minutes qu'il essaie d'échapper à l'as de l'aviation allemande, mais il sait aussi qu'à moins d'un miracle, il n'y arrivera pas. Une dernière manœuvre désespérée n'y fera rien, c'est la fin pour le français. Une seule rafale de mitrailleuse suffit à cribler son avion et à le blesser gravement. De façon assez chevaleresque, il parvient cependant à poser son appareil alors qu'il agonise. L'allemand le rejoint, atterrissant en douceur. Lorsqu'il est proche du pilote du Spad, il l'observe mourir. Il est alors frappé par leur ressemblance. En d'autres circonstances, ils auraient pu boire un verre et sympathiser en échangeant leurs points de vue sur leur façon de voler. Mais ce n'est pas le cas. C'est la guerre et Manfred Von Richtofen éprouve un plaisir sans pareil à vaincre. Pour lui, la guerre est la plus belle chose au monde...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dès la première scène, le lecteur est soufflé par l'intensité de la séquence d'ouverture. Carlos Puerta délivre des planches magnifiques, qui ont tout de peintures. Pierre Veys entame quant à lui une narration à la première personne, à la manière des voix-off du cinéma. Nous voici plongés dans les pensées du Baron Rouge, au moment où il fait ce qu'il sait le mieux faire : abattre ses ennemis en vol. Les auteurs d'Adamson se penchent donc sur la légende morbide de Manfred Von Richtofen, premier as de l'aviation de chasse, dont l'histoire traverse les générations. Le pari n'est pas facile, car il ne s'agit pas de la première adaptation en BD du fameux pilote allemand. A la fin des années 60, Bob Kanigher et Joe Kubert en avaient fait un récit reprenant les codes du comic-book de guerre, même s'il était un peu caricatural. Puis au début des années 90, George Pratt délivrait un album des plus inquiétants, dans lequel le pilote était devenu un vieillard qui confiait ses souvenirs horribles de la guerre. Ici, le parti pris psychologique diffère radicalement. Von Richtoffen est un ange de la mort, il aime littéralement la guerre. Personnage particulièrement inquiétant, il est même doté d'un don. Une sorte de capacité à percevoir les émotions extrêmes de ceux qu'il rencontre : la rage, la panique, il les sent comme le perçoit le prédateur. Cela lui permet aussi d'anticiper les manœuvres au combat. Au corps à corps comme dans les airs, il lit ouvertement la tactique de son adversaire, pour mieux le contrer et l'abattre. Cet élément introduit une touche d'étrange et de fantastique dans ce premier tome, qui installe remarquablement la série.