L'histoire :
En 1927, à Chatterlee dans le Mississipi, le grand fleuve est en proie à des crues historiques, forçant les populations à protéger leur village et leur champ grâce à des digues. Alors qu'ils craignent que l'une d'elle ne tienne pas, des hommes, blancs, se rendent dans une taverne où les noirs se détendent en écoutant de la musique, en buvant de l'alcool ou en dansant. Même si l'esclavage a été aboli, les blancs ordonnent à leurs employés de se presser car, même si la nuit est tombée, les eaux montent et ils ont besoin d'eux pour remplir des sacs de sable et consolider les digues. Parmi les noirs, se trouve Sonny un homme accusé de vol dans un bric-à-brac et recherché par le shérif. Celui-ci parvient à s'enfuir. Alors qu'il court à travers les environs, que les autres noirs sont conduits sur les fameuses digues alors que d'autres s'affairent déjà dessus, une lumière vive en provenance du ciel s'écrase sur la fameuse barrière de terre et de sable, laissant passer une grosse quantité d'eau. De l'engin sort un homme noir, un véritable colosse. Il ne parle pas un mot mais sa carrure, sa force et sa nature vont changer les choses. En bien ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Relativement discret ces dernières années, l'artiste britannique J.G. Jones se rappelait surtout à la mémoire des lecteurs et de ses fans par ses couvertures. En réalité, il préparait depuis longtemps un récit sur un thème qui lui est cher comme la ségrégation. Pour l'écrire, il s'est adjoint l'aide d'un scénariste chevronné en la personne de Mark Waid. Tous les deux vont façonner quatre épisodes racontant l'arrivée sur Terre d'un colosse à la peau noire et doté d'une force et d'une résistance rappelant les premières apparitions de Superman en 1938. Le contexte de Strange Fruit se passe à la fin des années 20 et pendant une période durant laquelle le Mississippi connut des crues historiques. J.G. Jones et Mark Waid n'ont rien laissé au hasard. Ils ont voulu ancrer dans la réalité l'arrivée d'un être pouvant sauver les terres des inondations, des drames qui se sont déroulés réellement. En outre, Strange Fruit est aussi le nom d'une vieille chanson de Billie Holliday basée sur un poème d'Abel Miropool. Les textes évoquent les nombreux afro-américains que le Ku Klux Klan pendaient aux arbres et qui faisaient donc office de... fruits étranges. Dénonçant la bêtise humaine, le manque de culture et d'intelligence, le récit se drape de tous les arguments nécessaires à en faire une lecture incontournable. Pourtant, malgré l'excellente entrée en matière du premier épisode, l'histoire peine à prendre l'ampleur qu'elle aurait du/pu avoir. Les événements se précipitent et il manque probablement un peu d'empathie ou d'émotions. La lecture reste tout de même intéressante d'un bout à l'autre de l'album. Strange Fruit s'appuie aussi sur des dessins exceptionnels de J.G. Jones. Chaque case est un régal et montre le grand soin apporté par l'auteur à son sujet. Strange Fruit est un ouvrage hautement recommandable, même s'il manque quelque chose pour le rendre culte... Southern trees bear strange fruit / Blood on the leaves and blood at the root / Black bodies swinging in the southern breeze / Strange fruit hanging from the poplar trees...