interview Bande dessinée

Federico Carlo Ferniani

©Glénat édition 2015

C'est par l'intermédiaire du premier album de Bravesland que les lecteurs ont pu découvrir le talentueux artiste italien Federico Carlo Ferniani. Après ne pige de quelques pages sur Prométhée, il s'est lancé dans l'adaptation de La voie du sabre avec Mathieu Mariolle, sur la base du roman de Thomas Day. Sur cette série, le talent du transalpin explose totalement. Son trait est encore plus détaillé et chacune de ses planches se révèle une œuvre à part entière. Nous avions croisé le dessinateur quelques semaines après la sortie d'un premier opus qui nous avait totalement embarqué !

Réalisée en lien avec les albums La Voie du sabre T1, Prométhée – cycle 1, T5
Lieu de l'interview : Salon du livre de Paris

interview menée
par
11 septembre 2015

Bonjour Federico Ferniani, peux-tu te présenter et nous dire comment tu as commencé à travailler dans l'industrie des comics ?
Federico Carlo Ferniani : Je m'appelle Federico Ferniani et je suis de Florence, en Italie. J'ai commencé à dessiner dès mon enfance mais je n'ai jamais suivi de cours dans une école d'art et en ça, je suis un autodidacte. J'ai commencé à travailler très tardivement. J'avais alors 25 ans et, avant ça, j'avais été policier, un « carabiniere ». [rires] Après le service militaire et la fac d'anthropologie, j'en ai eu assez et j'ai décidé de changer de voie. Il faut savoir que j'affecte particulièrement les films et les jeux de rôle et que, donc, mes premiers dessins étaient directement issus de ces univers. J'ai donc imaginé des histoires, j'en ai illustré les personnages, les décors, puis, j'ai amené le tout pour le présenter à un studio, InkLink, à Florence. On était alors en 1997 et c'est là que j'ai débuté. En Italie, on peut entrer ainsi dans un studio où des professionnels vous apprennent le métier. D'ailleurs, si mon style est si détaillé, c'est parce que quand j'ai officié en tant qu'illustrateur, là-bas, ils m'avaient mis en charge de la réalisation des petits détails tels que les arrières-plans arborés avec des milliers d'arbres à dessiner l'un après l'autre. C'est pour ça qu'aujourd'hui, j'aime travailler sur les petits détails. Quant aux comics, j'ai commencé à travailler en 2007, en France. InkLink avait alors fermé, suite à la crise éditoriale qui avait commencé avant la crise financière. InkLink ne pouvait alors plus continuer à employer autant d'artistes. Mais heureusement, un ami avec lequel j'ai travaillé au sein de InkLink, au même titre que Luigi Critone - m'a passé une adresse email, celle de l'éditeur Soleil. Je leur ai envoyé quelques planches, des exemples et ils m'ont engagé sur Bravesland. Et voilà l'histoire !

Quelles sont tes influences ?
Federico Carlo Ferniani : C'est une bonne question. Je ne sais pas si j'en ai vraiment parce que j'ai développé mon imaginaire à partir des films et des jeux de rôle comme Donjons et Dragons, mais les artistes... J'en apprécie tellement mais je ne sais pas s'il y a en a un en particulier... Ah ! J'aime beaucoup Serpieri ! Mais je pense qu'il ne serait pas d'accord avec moi si je lui disait qu'il m'a influencé. [rires] C'est un maître et je lui si bien inférieur !

Après Bravesland, tu as travaillé en partie sur Prométhée et, aujourd'hui, ton actualité c'est La Voie du Sabre, avec Mathieu Mariolle. Comment l'as-tu rencontré et comment t'es tu retrouvé sur ce projet ?
Federico Carlo Ferniani : Un matin, j'ai reçu un email de Mathieu Mariolle dans lequel il me disait qu'il avait aimé mon travail sur Bravesland. Et... Je dis toujours « oui » à tout le monde. Je ne le connaissais pas, je ne savais rien de lui et m'a demandé « Voudrais-tu travailler sur un projet autour des samouraïs ? », moi : «oui, oui». J'aime beaucoup l'univers du Japon médiéval, l'histoire de Miyamoto Musashi et j'étais fan de Vagabond. J'ai donc dit « Oui, j'aimerais pouvoir retranscrire ma version du Japon. ». C'est une version fantaisiste, pas historique. Je voulais en donner une version fantastique. Vagabond est une histoire très dynamique mais aussi attachée à l'histoire, du fait des costumes, des décors... Je voulais en faire une version fantastique.

La particularité de la Voie du Sabre est son aspect fantastique. On voit d'ailleurs apparaître une créature fantastique à la fin du premier tome. Est-ce que le second tome contiendra encore plus d'éléments de ce genre ?
Federico Carlo Ferniani : Je ne connais pas tous les détails de l'histoire dans son intégralité. L'auteur me confie le script petit-à-petit et je dois souvent anticiper l'histoire et ce qui va suivre en me basant sur nos conversations par emails. La seconde partie ne sera pas aussi ancrée dans le fantastique que la première. Il y aura beaucoup de sexe. La quasi-intégralité des 20 premières pages... En fait, non. Il y aura la description par Mikédi d'un grand palais dont chaque étage correspond à un degré d'apprentissage des plaisirs. Il y a donc le sexe, la nourriture, tout ce qui peut stimuler les sens. Ensuite, ce sera la guerre, des conflits. On verra le Dragon Impérial pour la première fois, et je suppose que ça impliquera nettement plus d'éléments fantastiques. Mais je m'efforce d'ajouter aussi du fantastique aux scènes de sexe. [rires]

Travailles-tu pas sur un deuxième tome pour Bravesland ?
Federico Carlo Ferniani : Si, si. Il faut que je le finisse. Il y a eu beaucoup de problèmes avec le second tome de Bravesland et, soyons honnête, ça a été de ma faute. Aujourd'hui, je travaille sur le second tome de La Voie du Sabre et aussi, en parallèle, à la suite de Bravesland. Mais, après ce tome de Bravesland, je me consacrerai pleinement à La Voie du Sabre.

Est-ce que tu lis des comics, des bandes dessinées et en as-tu des préférés ?
Federico Carlo Ferniani : Honnêtement, mes comics préférés sont les titres de chez Vertigo. J'aime Hellblazer, les vieux Sandman, Fables... Tous les projets Vertigo.

Rien d'européen ?
Federico Carlo Ferniani : Pour commencer, ils sont en français. En Italie, seuls les plus connus sont publiés. Il y a eu quelques titres de Bonelli mais ça remonte à mon enfance. Bandes dessinées ? Hmmm. C'est paradoxal mais je ne suis pas un grand lecteur de bandes dessinées. J'essaie d'en trouver mais... C'est un problème, avec moi. Les illustrateurs comme moi, on a tendance à ne lire les bandes dessinées que pour leurs illustrations. Les couleurs, les détails, le style... Donc, oui, j'ai des bandes dessinées à la maison mais je ne les ai achetées que par intérêt pour leurs illustrations, afin d'apprendre. Il faudrait que je m'y mette. C'est étrange.

Si tu avais le pouvoir cosmique de visiter le crâne d'un autre auteur pour en comprendre le génie, qui irais-tu visiter ?
Federico Carlo Ferniani : Ah ! Quel artiste... C'est une bonne question. Je ne voudrais pas paraître, comment dire, banal, mais j'aimerai pouvoir peindre car le noir et blanc, c'est très joli mais pouvoir peindre, c'est le summum, pour un artiste. J'aimerais donc pouvoir apprendre les techniques d'artistes comme Léonard de Vinci. Mon pouvoir serait de pouvoir voyager dans le temps et de pouvoir être invisible et observer ces artistes sans les déranger. Beaucoup d'artistes sont en effet talentueux mais de très mauvais professeurs et il vaut mieux pouvoir les observer que de leur demander d'expliquer comment ils font. Je ne sais pas si j'arrive à me faire comprendre ou si j'ai bien compris la question.

Grazie mille Federico !

Federico Ferniani