L'histoire :
Avalée par une baleine, Ruka se retrouve désormais au fond d’une grotte marine. Allongée sur des coraux, elle subit les étranges effets du petit morceau de météorite que lui avait confié Sora et qu’elle avait avalé avant qu’il ne disparaisse. Impassible, la voilà donc qui recrache un flot continu d’eau comme si elle était devenue une source intarissable. Et puis bientôt, elle voit apparaitre en ombre chinoise la silhouette de Sora. Une silhouette qui lui confie qu’elle a accompli son devoir et que bientôt la grotte sera inondée pour que Ruka disparaisse à son tour dans la mer. Ainsi, elle comprend qu’elle avait pour mission de transporter la météorite dans ce lieu précis pour que ce petit bout de matière se « réveille » enfin. Ruka doit désormais simplement fermer les paupières. Pourtant, elle veut savoir ce qui va se passer, garder les yeux ouverts et assister à « la représentation ». Connaissant son insatiable curiosité, la silhouette de Sora accepte sa demande en lui précisant que, une fois sortie de son corps, la météorite n’effectuera plus aucune « traduction » : Ruka devra réfléchir elle-même à la signification de ce qu’elle verra. La voilà donc prête à assister à la « fête de la Naissance ». Pour ce qui est de la météorite, c’est désormais l’affaire d’Umi...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Comme patiemment tisonnée au fil d’une saga aussi philosophico-poétique que singulière, la fameuse « représentation », spectacle gigantesque et grandiose, nous est enfin livrée en compagnie de Ruka et Umi. Quasiment muette, elle occupe d’ailleurs plus des deux-tiers de cette dernière partie et permet à Daisuke Igarashi de nous offrir une prestation graphique maritime de haute tenue. Luminosité surnaturelle, scintillements sous-marins, mouvements aquatiques hypnotiques ou émotions maritimes sont ainsi incroyablement servis par la finesse du trait, les habiles jeux de poignet et une manière de cadrer « sous l’océan » qui donne beaucoup d’intensité au récit. Aussi faut-il bien reconnaître que l’angle contemplatif l’emporte largement sur l’intrigue qui, une dernière fois encore, suscite plus de questionnements qu’elle n’en résout. Difficile donc de comprendre clairement la signification de ce dernier spectacle majestueux, de saisir parfaitement le rôle de Ruka, l’origine d’Umi et Sora, ou le sens profond qu’a voulu donner l’auteur à ce conte dense et envoutant. D’ailleurs, les personnages eux-mêmes semblent perdus et se livrent à des : « ce qui est important ne se dit pas avec des mots » ou des : « impossible d’expliquer de quoi il s’agit ». Nous voilà donc à jamais bien avancés et contraints d’aller puiser une explication dans nos propres émotions. Aussi, au probable cartésianisme d’Anglade et de Jim (dont les rôles s’éteignent un peu brutalement), Igarashi préfère-t-il la « sagesse sensorielle » de la vielle pêcheuse de perle Dédé. Voire aussi peut-être exécuter - plutôt qu’un jeu d’intrigues - une jolie parabole (ici représentée par le changement de relation entre Ruka et sa mère) sur la naissance. C’est un choix qui plus est maitrisé et donnant à l’océan un rôle et une puissance rarement égalés.