L'histoire :
2 juin 1909, an 42 de l'ère Meiji, Futabatei Shimei, correspondant à St Petersbourg de l'Asahi Shinbun a rendu l'âme. Fin du voyage d'une vie mouvementée dont Mori Ogai, aujourd'hui écrivain autrefois médecin, fut un témoin. Il fut aussi l'instigateur malheureux d'un tourment sous les traits harmonieux d'une jeune allemande. Traits qui prennent forme en l'an 21 de l'ère Meiji lorsque Mori, expatrié volontaire tombe amoureux d'Elise Weigert et lui propose de le rejoindre au Japon où il doit rentrer, afin de l'épouser. Promesse de samouraï pour Elise, transgression des lois morales pour Mori et rôle fortuit d'intermédiaire pour Futabatei qui tombe lui aussi sous le charme de cette étrangère courageuse et résolue. Avec l'aide de Saigo Chiro, un judoka de renom et Bigot, dessinateur français, cette dernière attend la venue de Mori en jouant les redresseuse de torts. C'est sur fond d'un Japon envieux du statut des grandes puissances et cherchant autant ses racines qu'à s'émanciper, que se joue cette fresque amoureuse : Mori parviendra t-il à épouser Elise quand ses obligations familiales rendent « ses désirs encores plus légers que des plumes » ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le 3e tome d'Au temps de Botchan continue de nous faire découvrir cette période si particulière de l'histoire du Japon, marquée par la chute du pouvoir shogunal et le passage vers la modernité. Modernité littéraire avant tout avec la mise en scène de nombreux auteurs dont Futabatei et Mori sont des acteurs importants. L'accent est mis cette fois sur le milieu des romanciers alors que le tome 2 mettait l'accent sur la poésie. Ce volume fait aussi écho du statut de l'étranger au Japon, et nous fait entrevoir le poids des traditions couplé au puissant désir d'excellence de ce pays. L'apparente contradiction entre modernité et tradition, véritable cliché du Japon, trouve ici un éclairage nouveau, plus fin, pour nos yeux d'européens. Moins fort émotionellement que le tome 2, d'où s'échappaient une tristesse et une mélancolie communicatives, ce tome n'en est pas pour autant moins intéressant. Les graphismes portées par la plume de Taniguchi, sont eux aussi empreints de ce mélange de modernité et de tradition, et très bien adapté au genre romancé. On pourrait lui reprocher une ressemblance entre les personnages rendant la lecture plus hardue mais l'ambiance est réussie et au fond c'est ce qui importe. Un tome destiné aux adeptes de la bd littéraire et aux avides de la culture japonaise.