L'histoire :
Momo, Rachid, Pap et Patrick, 4 jeunes de la cité des Mirabelles, ont des velléités croissantes d’indépendance. Notamment, Patrick a du jouer du flingue pour la première fois, en butant un caïd marseillais afin de récupérer le fric que la bande s’était fait escroquer. Aujourd’hui, c’est lui qui fait la loi aux Mirabelles, et leur petit trafic de drogue tourne plutôt bien. Tellement bien, qu’ils désirent aujourd’hui s’affranchir de l’intermédiaire des « A », leur organisation de tutelle. Cette opportunité leur sera proposée par Polzak, un ancien de la cité devenu flic à la PJ, qui se sert de Momo comme « cousin » (indic). Polzak accepte de laisser tranquille le petit business des 4 jeunes, à condition qu’ils aillent d’approvisionner directement auprès des gros bonnets espagnols, aux Marabella, et qu’ils le rencardent sur Elvis, le ponte qui chapote tout le trafic de stup. C’est risqué, insensé, mais l’appel du fric est le plus fort. Entre temps, une descente régulière de flics aux Mirabelles découle par inadvertance sur l’arrestation de Rachid : ses parents sont propriétaire d’une cave où on a retrouvé un peu de shit. L’occasion pour lui d’être présenté à un avocat issu du même quartier, Abdel Lamidi. Ce dernier a recours à une méthode mafieuse infaillible pour faire sortir Rachid de taule : la menace de mort sur témoin…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Côté cinoche, le récit lorgne entre La haine et Scarface (pas moins). Côté BD, on retrouve presque la violence et le climat de tension viscérale qui se dégageaient des Enragés de Chauvel. Sauf qu’ici, il ne s’agit pas tout à fait de fiction… A travers Le temps des cités, Pierre Boisserie (scénariste) et Frédéric Ploquin (journaliste spécialisé dans le sujet) retranscrivent la montée en puissance des caïds de banlieue et leur accession au grand banditisme, qui eurent lieu dans les années 80. Les faits racontés sont librement inspirés du parcours d’Ihmed Mohieddine et Nordine Mansouri, deux « racailles » qui sont à l’époque passés du statut d’hommes de main d’un Genova à l’ancienne, à celui de big boss d’une véritable entreprise capitaliste de la came. Ce second volet entre consciencieusement dans le vif du sujet. L’un des 4 jeunes vient de tuer pour la première fois, cela donne comme un coup de fouet à leurs velléités de croissance. Et d’aucun n’a le beau rôle dans cette histoire : espérant un démantèlement, c’est le flic qui leur indique la voie royale vers la prospérité ; et c’est la frangine, jusqu’alors vertueuse, qui leur trouve l’avocat le plus vicieux qui soit. Règlements de comptes, petits arrangements, invention du « go fast »… tout cela est brillamment amené, découpé et mis en scène, et en outre dessiné de manière réaliste, avec les masses d’encre noire idoines, par Luc Brahy. Une fois le récit commencé, le lecteur, au diapason de l’expansion fructueuse des 4 jeunes, ne peut plus s’arrêter…