L'histoire :
Tildä Nö arpente la planète [P-412] à bord de son aéroglisseur pour y faire des prélèvements de sol et de plantes. Elle est chercheuse spécialisée en énergies au service d’une compagnie toujours en quête de nouveaux sites d’extraction de minerai. Elle est souvent seule, à la surface d’une planète aride, avec ses boules-drones de prélèvements. Elle nourrit le projet secret de réussir à développer un carburant révolutionnaire, à partir de cactus, une idée qui a jadis germé chez sa grand-mère. Mais pour l’heure, ses recherches ne font pas le poids face aux huiles de roches et autres métaux rares. Alors qu’elle profite d’une pause pour fumer une pipe, une curieuse tempête de gros nuages noirs se lève. Les prévisions météo n’indiquaient pourtant rien de tel. Elle reprend donc aussitôt la direction de la base. Mais elle a pitié d’un vieil homme, un vagabond lui aussi solitaire, qui risque de se retrouver sous la tempête. Elle fait donc monter à bord San Williams de Farisin, poète en exil. Tandis qu’ils font aimablement connaissance, la tempête redouble. L’ordinateur de bord alerte : « dépression atmosphérique extrême – défaillance stabilisateur – atterrissage d’urgence activé ». Leur engin se crashe en plein chaos. Quand les éléments se sont calmés et qu’ils reviennent à eux, beaucoup de choses ont changé. Le désert s’est transformé en marécage, avec une vie organique développée. Tildä a rajeunit jusqu’à redevenir adolescente. San Williams s’est transformé en grenouille géante. Sont-ils toujours sur la même planète ? Dans la même dimension ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Jop nous livre ici un étonnant « conte » de science-fiction empreint d’écologie et de poésie ! Etonnant mélange, n’est-il pas ? Les deux personnages principaux évoluent sur une autre planète que la Terre, mais toute autant en proie à une fuite en avant énergétique destructrice. Il leur arrive alors un phénomène surnaturel un peu dingue, suite à une tempête « magnétique » : Tildä la scientifique rajeunit d’une quinzaine d’année et San Williams le poète devient un batracien géant. Un périple (initiatique !) débute alors vers un camp de rebelles écologistes, où ils s’aperçoivent que les autres humains ont connu des métamorphoses similaires : vieillissement, rajeunissement, zoomorphose… Les cycles de la nature semblent dès lors répondre différemment à ce qu’on connait. Et puis interfère cet étrange être extraterrestre sans visage, sorte de rodeur démiurge bienveillant… sans qu’on comprenne tout. Mais a priori, tout expliciter n’est pas le but. Avec son dessin stylisé original, très particulier et très coloré, Jost cherche avant tout à secouer la fibre de nos instincts naturels reptiliens. En interview, Jost avoue par exemple que l’alien sans visage incarne le « savoir ancestral, l’équivalent du monolithe noir de Kubrick » dans 2001… un film qui se concentre lui aussi plus sur les sensations que sur les explications. Bonne chance aussi pour expliquer le titre ! A travers cette aventure douce-étrange, Jost nous pousse avant tout à redéfinir notre rapport au monde.