Marc Jondot a été dé couvert par les éditions Mosquito à l’occasion du premier album de l’auteur : L’île d’Om, paru en 2021. Depuis, ce professeur Tiernois enseignant à Clermont Ferrand a réalisé trois autres ouvrages, jusqu’en 2024, dont deux dans le même genre d’ambiances, avec le personnage central du faucheur. Mais La rotisserie de la reine Pédauque, adapté d’Anatole France, ressort cependant du lot. Discussion impromptue à l’occasion du festival d’Angoulême.
interview Bande dessinée
Marc Jondot
On a déjà eu l’occasion de parler de tes albums fantastiques, que l’on apprécie beaucoup sur PlaneteBD. Le thème de la nuit semble être un élément récurrent de tes albums, tout comme dans la Rotisserie...
Marc Jondot : C’est une interprétation de ma part, car il n’est pas nécessairement question de scènes nocturnes. C’est à la limite du fantastique. Anatole France n’est pas foncièrement dans ce genre d’ailleurs, mais c’est ce qui m’a plu, même si ce n’est pas « déclaré ».
Ce n’est pas courant en tous cas d’adapter cet auteur ?
Marc Jondot : Et bien, il n’y en a jamais eu en fait. C’est ce qui m’a plu aussi. J’avais vu une série télévisée dans les années 1970 qui adaptait ça, et je m’étais dit « mais c’est quoi ce truc !? ». Alors, j’ai lu le bouquin, deux fois, et là je me suis dit « mais c’est génial ce truc ». Cette atmosphère, qui n’est pas facile à résumer. C’est assez inclassable. Les lieux, les scènes d’alchimie, les personnages dont on ne sait pas s’ils sont réels ou pas, d’ailleurs on ne comprend pourquoi le bouquin porte ce titre. La scène de départ se déroule effectivement dans une rôtisserie, mais après trois pages, c’est fini ! Il y a toute une histoire de bibliothèques, de reliques égyptiennes…
Tu vas beaucoup intéresser les bibliothécaires (comme moi), là !
Marc Jondot : Anatole France était le fils d’un libraire et il était collectionneur de bouquins jusqu’à la fin de sa vie. Or dans tous ses livres, il y a une bibliothèque ! Je suis un amoureux des bouquins et j’adore dessiner les bibliothèques !
Penses-tu faire évoluer ton travail de professeur, vu le temps de plus en plus important que tu consacres à la bande dessinée ?
Marc Jondot : Oui, bien sûr, j’aimerais pouvoir prendre un mi-temps, mais financièrement, c’est délicat, parce que j’ai des enfants, qui se sont mis en tête de faire des études, qu’il faut bien financer… Mais dès que je peux, oui, je le fais. J’ai suivi jusqu’à présent un rythme assez fatiguant, mais c’est pour cela qu’actuellement, je fais une pause. Je lis, je réfléchis, je fais des croquis pour l’instant. Je n’arrive plus à me lever à trois heures du matin en ce moment.
D’où te vient cette faculté à dessiner, même si cela a pris un peu de temps avant de te lancer vraiment ?
Marc Jondot : Je dessine depuis que je suis tout petit. Déjà, à l’école, je faisais des dessins pour les copains. D’ailleurs, j’ai une anecdote datant des quelques années que nous avons passées avec mes parents à Tahiti, où nous résidions pour suivre mon père, qui était journaliste à FR3. On s'est retrouvé là-bas après sa mutation à RFO pour 3 ans. Il se trouve que tout début des années 80, j’y ai rencontré Hélène Giraud en 3ème, au collège donc. Elle débarquait avec tout un groupe, les enfants des uns dans une maison en contrebas de celle des parents, perchée sur une falaise, un endroit incroyable. Je connaissais le travail de Moebius depuis peu, l'Incal (dans Metal hurlant), et surtout Arzak que je scrutais à la loupe. Lorsque je l'ai rencontré, grâce à Hélène, je lui ai montré mes petites productions laborieuses, plume et encre de chine, et je me rappelle bien le conseil qu'il m'a donné : « Arrête l'école et jette toi à corps perdu dans le dessin, il faut ne faire que ça ! »
Un conseil auquel je pense souvent, puisque je ne l'ai pas appliqué. Pression familiale et surtout manque de courage ! Une histoire courte mais intense dans mon souvenir. J'ai beaucoup regretté de ne pas l'avoir revu.
Merci Marc. Et au plaisir.