L'histoire :
L’été 1839, alors qu’il est jeune adolescent, Jules Verne monte clandestinement à bord de la Coralie, un voilier marchand qui mouille dans le port de Nantes. Il s’amuse à en visiter les recoins, les cales, à jouer avec le gouvernail, et finit par se cacher sous un hublot pour espionner une discussion entre le capitaine et un explorateur. Ce dernier lui montre un « astrolabe », un outil d’astrologie remontant soi-disant à l’ère de l’Atlantide ! Jules n’a pas le temps d’en apprendre plus : son paternel vient le chercher en le tirant par le lobe de l’oreille. 18 ans plus tard, Jules discute de son prochain roman avec son éditeur Hetzel, tout en se promenant dans les rues de Paris, qui sont alors en train d’être redessinées par Hausmann. Puis il reçoit la visite de son frère Paul, totalement enthousiasmé par un projet fou : emmener Jules dans un voyage en Amérique, sur le Great Eastern, un immense paquebot qui doit prochainement partir de Liverpool. Jules se laisse séduire par cette idée. En mars 1867, Jules et Paul embarquent ainsi sur le Leviathan. Mais Jules est intrigué par un mystérieux bonhomme et sa malle, de laquelle émane une musique qu’il connait bien : la voix de la cantatrice Estelle Duchesne, dont il est tombé amoureux quelques mois plus tôt. Pire : durant une tempête, il croise son fantôme dans une coursive du paquebot…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Une aventure de Jules Verne, à la façon de Jules Verne ! C’est à ce projet amitieux que se sont livrés Esther Gil et Carlos Puerta avec les deux tomes de cette série parue en 2016 et 2017, en s’en donnant largement les moyens. Le périple (fictif !) auquel ils convient le célèbre romancier prend corps en 1867, c’est-à-dire après l’écriture de Voyage au centre de la Terre, mais avant 20 000 lieues sont les mers, à peu près pendant qu’il écrivait Les enfants du capitaine Grant. Vous en déduirez – à raison – que ce qu’il va vivre inspirera ses œuvres à venir… Primo, pour respecter la dimension spectaculaire aux frontières du fantastique, il fallait une quête d’un mystère emphatique : ce sera un astrolabe, soit outil d’astrologie à la finalité non définie, dernière relique du légendaire empire de l’Atlantide. Deuxio, pour coller au principe du road trip exotique et rocambolesque, Jules et son frère Paul se retrouvent à explorer une base secrète située sous les chute du Niagara. Tertio, pour honorer la confrontation avec une némésis mégalo digne de la littérature de l’époque (façon Moriarty ou Némo), ils se confrontent (enfin, Jules, surtout) à une personnalité aussi géniale que suprématiste. Quatro, on ne s’émeut évidemment pas de croiser à la fois des indiens, des inventions révolutionnaires, une technologie post-steampunk, des explosions, des vues du futur, une base improbable… Bref, on se croirait dans un Jules Verne et ce sentiment est à mettre au crédit d’Esther Gil, qui a incroyablement besogné son sujet, à partir de moult documentation. Pour compléter ce haut-niveau séquentiel, le dessinateur Carlos Puerta livre une partition graphique d’un réalisme et d’un niveau de détail époustouflants, avec la petite touche sépia et surannée ad hoc. Si certaines illustrations semblent trafiquées et recomposées à partir de diverses gravures du XIXème, avec son aspect figé inhérent, le rendu général est d’une formidable cohérence artistique.