L'histoire :
Joe a réussi à s'enfuir du bar où il était maltraité par sa propre femme et son amant. Il a retrouvé la vieille maison et sa cave mystérieuse, où il se rend, bien décidé à franchir une nouvelle porte. Il espère bien entendu revenir dans sa vraie vie, celle de l'écrivain à succès qui reçoit un journaliste en interview dans le jardin de sa propriété. Mais lorsqu'il remonte du sous-sol, un vieil homme lui fait face, armé d'un fusil. Il s'enfuit et se retrouve interpellé par un homme qui semble le reconnaitre, et l'emporte en voiture vers un meeting politique. Ici Joe est un maire ambitieux qui poursuit une carrière politique soutenue par de puissants lobbies, et organisée par les relations qu'il a construites lors d'un séjour en prison. Dans la voiture qui le conduit, il prend connaissance du rapport écrit par Richard Wright, un jeune journaliste, sur sa vie. Ce document lui confirme que dans cette réalité, son père n'avait pas réussi à faire annuler la plainte de Flemming après l'incendie de la grange, d'où le séjour derrière les barreaux et les rencontres qui l'ont conduit à cette carrière politique. Mais Joe ne va pas pouvoir continuer plus longtemps à observer cette nouvelle vie sans réagir. En effet, ses hommes de main ont kidnappé le fils du journaliste d'investigation et Joe se trouve mêlé à la confrontation au cours de laquelle des menaces très claires sont proférées à l'encontre de Wright. Joe va alors prendre une série de décisions qui vont surprendre ses proches, étonner le monde politique, et rapidement éveiller les soupçons de son entourage quasi mafieux. La pression va monter autour de lui... il va devoir fuir à nouveau.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Mené tambour battant, cet album clôt l'histoire de Joe Horton aux prises avec ses réalités parallèles. Le très expérimenté Rodolphe (scénariste entre autres de Kenya, Trent et Les enquêtes du Commissaire Raffini) démontre à nouveau ses qualités lorsqu'il s'agit de conduire un suspense sur fond de mystère. Rodolphe aime par dessus tout mettre ses personnages face à des situations inconnues ou incompréhensibles, et ménager pour son lecteur la surprise de leurs réactions. Il le fait particulièrement bien ici, servi à merveille par Lounis Chabane, un dessinateur qui propose un trait classique précis et d'une très grande régularité, parfaitement épaulé par le coloriste Sébastien Bouët. On s'amuse en découvrant que le journaliste (qui s'appelle Richard Wright... comme le regretté clavier de Pink Floyd) est par ailleurs le portrait craché de Jérôme K Jérôme Bloche, personnage de BD célèbre. Comme souvent, ce sont les annnées 60 que l'auteur a choisies pour dérouler son intrigue, évidemment par goût pour cette époque, très typée visuellement, et probablement aussi pour pouvoir mettre en scène une très jolie Alfa Romeo d'époque (avec une immatriculation belge... nouveau clin d'œil ?). Pour en revenir à l'intrigue proprement dite, Rodolphe parvient à maintenir l'intérêt compulsif du lecteur pour le sort de son personnage, tout en entretenant l'aspect répétitif du franchissement des portes. Le choix de trois albums procure un bon équilibre à l'ensemble, qui évite le sentiment de tirer en longueur et donne le temps de s'imprégner de cette atmosphère étrange, voire d'attendre avec impatience un nouveau passage de porte. La relecture du tryptique au complet confirme cette impression, pour nous conduire au final vers une conclusion très... « Rodolphienne ». Construit avec sérieux, sur des dialogues précis, mis en images par un duo dessinateur-coloriste très efficace, Si Seulement est une bonne histoire à suspense, qui ravira les amateurs de scénario solide.
