L'histoire :
Au terme d’une saison sèche, un paléontologue explore en barque les berges du lac Tanganyaka, au cœur du massif du Ngorongoro (actuelle Tanzanie). Le niveau exceptionnellement bas lui permet de repérer une cavité dans la roche et il part l’explorer. Il découvre alors une grotte ornée d’étranges peintures, ainsi qu’une lueur provenant du fond. Intrigué, il plonge et emprunte sous l’eau un nouveau passage qui le fait déboucher dans une salle sacrée appartenant à une civilisation inconnue ! Il ne peut s’empêcher de décrocher la bague d’une statue et déclenche aussitôt un système d’alerte. Des indigènes coiffés de peaux de lycaon le poursuivent alors et le blesse d’une lance tandis qu’il s’enfuit en empruntant le même trajet, la bague en main. Trois mois plus tard, à Londres, le professeur Mortimer passe quelques examens médicaux, a priori pour surmenage. En sortant de chez le médecin, il rencontre Nastasia, qui lui fait part des résultats d’analyse d’une roche antarctique ramenée de sa dernière aventure. Les gravures figurant sur celles-ci laissent en effet croire qu’une intelligence existait sur terre il y a plus de 350 millions d’années ! Après avoir annoncé cette découverte à Blake, son vieil ami, ce dernier lui suggère de creuser la chose aux archives du Daily Mail. Il y fait le rapprochement avec les inscriptions trouvées sur une mystérieuse bague rapportée d’Afrique par un certain paléontologue, devenu fou depuis lors…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Présenté comme une nouvelle aventure de Blake et Mortimer, Le sanctuaire du Gondwana livre néanmoins rapidement des relents du précédent diptyque, les sarcophages du troisième continent. Une sorte de troisième tome du diptyque, en quelques sortes, où Blake est aux trois quart absent. Tout part en effet d’une nouvelle découverte Antarctique (on retrouve le pr. Brousse et son Subglacior II), pour finir par une réutilisation des prodigieux sarcophages. Entre temps, Yves Sente réussit le tour de force de condenser à peu près toutes les thématiques issues de la sphère culte des héros : périple exotique, tribus magiques, fauves féroces, civilisation perdue, découverte ethnologique invraisemblable, performance scientifique digne de la SF, usurpation d’identité… L’exercice relève presque du challenge ! On se laisse même gentiment bluffer durant la majeure partie de l’aventure, avant une révélation finale éneaaaurme (sic), digne d’une bonne vieille série Z. Après tout, déjà du temps de Jacobs, ces aventures extravagantes ont toujours volontiers emprunté le ton de la série Z… Dès lors, on n’est plus à une invraisemblance près : on ne compte plus les incohérences, les raccourcis narratifs et les épisodes totalement grandguignolesques. C’est à la fois une belle preuve de respect au ton originel des aventures de Jacobs, s’appuyant sur des dialogues délicieusement surannés (Old chap !), et une déception en ce qui concerne l’intérêt profond de l’aventure. Côté dessin, André Juillard prouve une nouvelle fois sa totale maîtrise du code graphique jacobsien : des caractères des personnages aux décorums un peu kitsch dans lequel ils évoluent, l’orthodoxie est rigoureuse et franchement épatante ! Pour creuser cette formidable opération de reprise, n’hésitez pas à vous procurer le somptueux recueil hors-série Dans les coulisses de Blake et Mortimer. En marge de crayonnés et de d'aquarelles, le duo d’auteurs revient sur nombre d’anecdotes et d’éclairages sur le processus de création (et sur les frustrations inhérentes !) des 4 tomes qu’ils ont signés. Un sacré boulot, by Jove !