L'histoire :
Deux pauvres hères ont cru pouvoir sortir des camps pour braconner. Ils ont juste eu le temps de zigouiller une chauve-souris mutante à tête humaine, avant qu’un robot-arachnide ne les repère et ne leur pulvérise la cervelle à coup de rayons lasers. Pendant ce temps, l’inspecteur Robs de la Federal Food Corp arrive enfin à l’usine alimentaire FA-33, pour sa visite sanitaire. Les cyborg volants du gouverneur Gucco ont beau lui faire le meilleur des accueils, l’endroit est tellement insalubre que son rapport sera sans aucun doute des plus assassins. Ces évènements sont suivis de loin, via ondes télépathiques, par le mystérieux étranger solitaire qui poursuit son chemin dans le désert post-apocalyptique, tel un cow-boy du futur. Ses incroyables pouvoirs psy lui permettent aussi de neutraliser les drones qui sillonnent le secteur. Il rejoint un robot ami dans une caverne, et récupère un précieux paquet, qui a « conservé toute sa fraicheur ». Enfin, les 3 pèlerins – dont Vigo, à tête de cochon – souffrent toujours d’hallucinations charnelles abominables. Ils regrettent amèrement d’avoir suivi les conseils du singe Makaka, en ingérant les intestins de cette créature répugnante…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Si vous avez lu le tome 1 et/ou parcouru le résumé hallucinant ci-dessus, vous êtes averti : ce second tome poursuit strictement dans la même ligne déjantée. En effet, Yacine Elghorri fait partir de ces auteurs qui nagent à contre-courant de la production consensuelle actuelle (Delmas, Jodorowski, Pion…). Ses références sont celles des années Moebius, des ambiances glauques et futuristes de Metal Hurlant, voire des délires organiques de Giger ou de Cronenberg. Dans ce second opus (sur 3 prévus), on suit à nouveau plusieurs fils narratifs intercalés : les troubles gastriques des pèlerins, l’étranger solitaire qui poursuit résolument une mystérieuse mission, la tyrannie des drones sur les bidonvilles et l’inspection de l’usine du gros Gucco, entrecoupée par les considérations des soldats derrière leurs masques à gaz. Ces saynètes sont (encore pour le moment) détachées les unes des autres. Leur seul point commun se situe dans un décorum post-apocalyptique sordide, qui empiète largement sur l’hermétisme – jubilatoire pour les uns, répulsif pour la plupart – et se délecte de scènes d’horreur pure – jubilatoire pour les uns, répulsif pour la plupart. Son « scénario » vise essentiellement à se donner une entière liberté de manœuvre à la mise en place de ses univers de prédilection. Car aux crayons, Elghorri prouve une nouvelle fois sa parfaite maîtrise du registre. Souvent dépouillées d’arrière plan, ses cases font néanmoins la part belle aux paysages arides, décors industriels, bidonvilles immondes, tronches de drones/cyborgs abominables ou… bocaux physiologiques où des fœtus convulsent en des gerbes de viscères et de furoncles sanguinolents. Miam ! A noter : l’auteur explique sa démarche artistique en postface, dans une très (très) intéressante interview…