L'histoire :
Mattias, 12 ans, appartient à une famille de forgerons saxons. Il vit avec sa mère et ses deux sœurs Britta et Gerta. En l’absence de son père Kristofer, parti sur les routes pour ferrer des chevaux et affûter des outils, et pendant que sa famille dort à poings fermés, il forge une dague. Il espère que son père sera fier de lui à son retour. Il entend des bruits dehors. Il sort de son atelier et voit une bande de brigands mettre leur demeure à feu et à sang. Des hommes sanguinaires exécutent ses sœurs et violent sa mère. La colère l’envahit, il prend sa dague pour assouvir sa vengeance. L’un d’entre eux le vise avec son arc, s’apprêtant à lui décocher une flèche… quand il est sauvé par un cavalier écarlate. Ce guerrier est un capitaine des Sari Bayrak, les plus anciens et valeureux gardes personnels du sultan. Il le recueille et lui donne le nom d’Ibrahim.
Malte, mai 1565. Les chevaliers chrétiens de l'ordre des Hospitaliers, aussi nommés la Religion, se préparent à l'invasion de l'île par Soliman le Magnifique et ses 45000 « lions de l'Islam ». Le combat semble perdu d'avance. Face au siège qui s’annonce d'une violence inouïe, le grand maître La Valette convoque Mattias Tannhauser, un ancien janissaire du sultan, devenu trafiquant d'armes et d'opium. L’avantage, c’est qu’il connaît parfaitement l’ennemi. D’abord indifférent aux intérêts de l'ordre, il se résigne à apporter son aide pour venir en aide à la comtesse Carla de la Penautier...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A l'origine, La Religion est un roman de Tom Willoks, un auteur britannique. À sa sortie, les critiques n’ont pas manqué de souligner son hyper-violence, ses batailles sanguinolentes et de voir en lui un digne héritier de Umberto Eco et de James Ellroy. Rien que ça. C’est d’ailleurs sûrement ce qui a poussé Luc Jacamon dans cette nouvelle aventure. Difficile de passer à autre chose après avoir illustré pendant presque 20 ans les pensées du Tueur, l’une des séries mythiques du 9ème art. Sa série Cyclopes, stoppée en plein vol, en avait d’ailleurs payé les pots cassés. Cette fois-ci, il collabore avec Benjamin Legrand, scénariste rare en BD, qui a collaboré avec de grands noms tels que Tardi, Druillet ou Rochette. Sa mission est d’ailleurs assez complexe, le pavé de Willoks flirte avec les 900 pages. Mais l’ancien assistant-réalisateur de Demy, Rivette ou Molinaro ne voyage pas en terre inconnue (avec Frédéric Lopez). C’est en effet lui qui a traduit La Religion pour les éditions Sonatine. L’introduction est dense avec une masse de texte impressionnante, tant et si bien qu’on se perd. Peu à peu, le brouillard narratif se dissipe et la lecture s’enchaîne aisément avec, en figure de proue, Mattias Tannhauser, sorte de Han Solo du Moyen-Âge. La fougue du texte original prend le pas, bénéficiant du coup de crayon magistral de Jacamon. Son trait est précis, laissant place quelquefois à des doubles planches impressionnantes, donnant l’impression d’être au cœur de l’histoire. Ce qui marque ici, c’est sa capacité à restituer la violence des combats et des duels, avec du sang qui gicle à tout va. Il faudra bien entendu attendre la suite pour se faire une idée plus précise. Les plus pressés se jetteront sans attendre dans la lecture du roman de Willoks, les plus patients attendront le prochain tome…