L'histoire :
Au Vukland (NDLR : un archipel imaginaire au sud du Groënland), la guerre entre les indépendantistes kiviks et le régime légitime vulko s’intensifie chaque heure un peu plus. A l’origine : un projet de barrage controversé, qui permettrait de développer l’industrie (projet vulko), au détriment de la terre ancestrale kivik. Deux adolescents au cœur des débats sont en cavales, tous deux affectés de manière complémentaire par une pierre « magique », une kavikadik. C’est-à-dire que lorsque Run va mieux, Jo décline ; et réciproquement. Run est le fils de l’ingénieur vilko Georg, inventeur du barrage, et de l’indépendantiste kivik Valka. Jo est la fille de Roka, l’ancien chef de la sécurité du président Pürsson, handicapé dans un fauteuil roulant, au pouvoir déclinant. Or lorsqu’ils sont réunis, la santé de Run et de Jo se stabilise. Ensemble, malgré le territoire perclus de combats, ils décident de rejoindre la « grotte des morts. Ils sont persuadés que bien des réponses à la situation se trouvent là-bas et que ces réponses pourraient bien dépasser le strict cadre cartésien. Mais après l’assassinat par erreur d’un puissant industriel chinois – c’est Georg qui était visé – un autre attentat s’apprête à retentir sur les chaînes d’information. Lors du discours inaugural de Pürsson, un drône kamikaze explose au-dessus de la tribune…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans ce tome 4 de No war, en contre-pied sémiologique du titre, la guerre civile s’intensifie et se complexifie un peu plus au Vukland, archipel imaginaire situé au large Sud du Groënland. En auteur complet parfaitement maître de la destinée de ses personnages et de l’univers chaotique qu’il a créé, Anthony Pastor fait durer le plaisir au sein d’un enjeu politique savamment élaboré et de dizaines de personnages aux ambitions toutes aussi ambigües. A part quelques skins clairement abrutis, il n’y a pas vraiment de méchants ; à l’exception du personnage de Run, adolescent à la croisée des chemins, héritier des deux cultures (kivik et vulko), il n’y a pas vraiment de héros. Visuellement, Pastor fait perdurer une griffe particulière, un encrage à la fois austère et un peu rough, en tout cas parfaitement en phase avec le propos : un dessin qui conjugue de manière cohérente le charbonneux, le réalisme et l’expressif au sein d’une gamme colorimétrique de quelques teintes fades et grisâtres, au lavis. Il est impossible de résumer (ci-dessus) la situation dans toute ses intrications, tant elles sont nombreuses et font appel à des paradigmes différents et superposés (politiques, ethniques, familiaux, ésotériques). Avouons simplement que cet opus ne signe pas la fin de l’aventure, mais il la fait crucialement progresser. Il y a du sang et des larmes, mais aussi des cavales tendues, des combats rythmés, des palabres révélateurs, des manœuvres tordues, un repentir de première importance quoique prévisible et le début du commencement d’une solution… qui interviendra – heureuse ou tragique ? – pas avant le tome 6, dernier prévu de cette savante saga.