L'histoire :
Novembre 1937. Tandis que Bernd Rosemeyer, pilote chez Auto Union, et sa toute récente épouse, l’aviatrice Elly Beinhorn, célèbrent l’arrivée de leur premier enfant, Bernd junior, le Nürburgring est en deuil : au Grand Prix d’Allemagne, Ernst Von Delius vient de perdre la vie. De l’autre coté de la Manche, dans un petit-à-terre de Westminster, on évoque aussi l’Allemagne mais pour de toutes autres raisons : la mystérieuse Lady Redesdale-Lark est reçue par Winston Churchill. Ces deux-là s’étonnent de la passivité des allemands devant Hitler et sa bande de voyous. Tout autant que de celle de Chamberlain, le Premier Ministre atteint lui aussi de cécité. Tous savent qu’un quatrième camp dit de concentration a tristement ouvert ses portes depuis peu. Officiellement camps de rééducations pour délinquants, il n’y a guère de doute sur ce qui s’y passe réellement : travail forcé, affamement, sévices, humiliations. Et ce n’est malheureusement qu’un début… De son côté, Leslie Toliver s’essaie tant bien que mal, avec sa jeune fiancée Erika Pasternak, aux joies du patin à glace. Mais la rencontre est avant tout un prétexte pour s’entretenir en secret avec le Docteur Kaatz. Au menu : le dangereux jeu de dupes joué par l’Angleterre et l’Allemagne au centre duquel Blanche – Lady Redesdale-Lark – et sa sœur Dolphin jouent un rôle périlleux. Toliver apprend également l’existence d’une 3éme sœur. Une dont il ne sait pas encore qu’elle comptera beaucoup dans son destin…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Construite sur une combinaison à tiroirs mêlant sport automobile et montée du nazisme, cette trilogie qui s’achève, aura parfaitement tenu ses promesses didactiques. Sérieusement documenté, c’est en effet à un double travail de mémoire (sportif et historique) que s’est livré avec passion Marvano. Impeccable, l’égrenage consistant à décrire le contexte avant guerre et en particulier l’odieuse mécanique hitlérienne. Judicieuse, encore, la démonstration de l’incroyable cécité du monde alentour. Parfaitement décrite l’ambigüité voire l’ambivalence des comportements. Astucieuse enfin la trame sportive – mettant en scène des protagonistes réelles et fictifs ou d’incroyables machines sublimement carrossées – pour angle de traitement. Le tout servi par une foule d’anecdotes historiques, une petite « chronologie du progrès » et un découpage hyper dynamique (mais parfois dangereusement savonneux en terme de lisibilité…). Bref, l’exercice aura en prime rempli son objectif divertissant. Seul regret déjà évoqué : la timidité de l’intrigue romanesque qui, pourtant superposée à la trame historico-sportive, aura trop souvent manqué de capter complètement notre intérêt. Et justement, pour nous faire mentir, ce dernier chapitre livre enfin son meilleur cru. Sous la houlette de Leslie Toliver la veine romanesque s’emballe, livre révélations, secrets et offre un peu plus de relief à la série. Il y a cette fois une véritable volonté de mettre en scène les personnages, de les faire à leur tour acteurs des évènements. Aussi, l’ensemble est-il dense mais impeccablement rythmé. Réel et fictif se jouent alors parfaitement de nous, en nous abandonnant aux destinées de Toliver, Kaatz, Dolphin, Churchill, Rosemeyer ou Carracciola, pour une inéluctable avancée des horreurs de la politique nazie et la déclaration de guerre. Et du coup, c’est bien la réponse à la taraudante question du « comment a-t-on pu laisser faire ça ? » qui partiellement se dévoile au fil de la trilogie. En tout cas, une bonne piqûre de rappel, toujours agréablement mise en dessins, pour ne jamais oublier.