L'histoire :
En juin 1938, un étonnant français à moustaches et costume, appelé Louis Jacques Mandé Daguerre, débarque d’un gros paquebot sur une petite île grecque. Il est venu se « mettre au vert » après avoir inventé un procédé révolutionnaire, qu’il ne sait pas trop comment protéger. Il est venu chercher conseil – et la paix intérieure – auprès de son ancien condisciple dans son vieux laboratoire parisien, Taki. Il lui faut gravir un interminable escalier entre les maisonnettes du patelin avant de rejoindre son ami dans son habitat blanc, tout en haut de la colline. Une fois au calme, Daguerre montre son invention à Taki : une sorte de boîte en bois, avec un objectif d’un côté et des plaques de l’autre. Cet appareil permet de saisir des images de la réalité qui se trouve devant l’objectif. C’est ce qu’on appellera bientôt un « appareil photo », mais plus perfectionné que celui mis au point par Nicéphore Niepce, car il n’y a pas besoin d’attendre 12h pour que l’image apparaisse. Il l’a appelée « Daguerréotype ». Taki ne comprend pas trop la frilosité de son ami à divulguer son invention au monde. C’est génial, il faut l’expérimenter et qu’un maximum de monde en profite !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le français Louis Daguerre fut l’un des inventeurs de la photographie, avec Nicéphore Niepce. L’idée première vient de Niepce, mais Daguerre l’a largement améliorée, profitant de la mort précoce de Niepce pour graver son nom à la postérité – le daguerréotype – remporter le marché et faire fortune. La présente histoire narrée par Nikos Tsouknidas est a priori fictive : cet auteur grec s’est vraisemblablement approprié la nationalité de l’authentique François Arago, sous le nom de Taki, qui a aidé Daguerre à faire valoir son invention auprès de l’Académie des Sciences et du grand-public. Le récit se base sur quelques jours de l’année 1938, après que le daguerréotype a été mis au point, mais avant qu’il soit rendu public. La révélation du « langage photographique » viendra avec l’aide plus ou moins volontaire d’un ado ingénieux et turbulent, Marko Gavras, et dans le cadre estival baigné de lumière d’une île grecque qui ressemble à Santorin. Plus qu’une bribe d’histoire de la photographie, Tsouknidas fait avant tout une véritable ode à son pays, à ses paysages, à ses traditions et sa culture au XIXème siècle. Et à la douleur de s’en trouver déraciné. La narration n’est pas très inclusive vis-à-vis du lecteur (des séquences et des dialogues auraient mérité d’être allégés), mais le dessin est stylisé, plutôt original et abouti. Le registre infographique fait parfois penser à Bastien Vivès (en plus fin), très vif et dynamique. Il surfe beaucoup sur la couleur blanche typique des maisons du coin pour… s’affranchir le plus souvent de décors ou de couleur d’arrière-plans. Le blanc est très majoritaire et impose l’image d’un pays nimbé de lumière.