L'histoire :
Drogué de Jazz et de soirées sans fin, Alexis passe une nouvelle nuit à s’enivrer de sa musique dans le quartier parisien Saint-Germain des prés. Le saxo aux lèvres, en plein trip au beau milieu de la fontaine Saint-Michel, il se fait embarquer par les flics. Après une nuit passée au poste, il rentre chez lui pour découvreir un petit mot de sa compagne, Mary. Elle en a marre de cette vie de débauche, elle est partie. Il accourt aussitôt chez Laure, la meilleure amie de cette dernière, pour se faire infliger une fin de non-recevoir. Son contrebassiste (le frère de Laure ?) parvient toutefois à lui obtenir une adresse et un numéro de téléphone : ceux de sa « merveilleuse maison de famille à Dinard ». Toujours en proie à une sévère gueule de bois, Alexis prend néanmoins la route, vers l’ouest, dans son cabriolet Peugeot 203 décapotable blanc. Il roule depuis plusieurs heures lorsqu’il manque soudain de renverser une fillette. Il freine brusquement et dérape sur le bas-côté. La fillette monte calmement, croyant être prise en stop. Avec une assurance impérieuse, elle lui demande à être déposée à Chartres. Là-bas, Alexis en profite pour téléphoner à Mary – ça sonne dans le vide – et pour assister au défilé du 14 juillet. Puis il reprend la route, toujours en compagnie de son saxo, son cabriolet et sa bouteille de whisky…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce one-shot de la collection Long courrier est un hommage au jazz sous toutes ses formes. Le héros, en premier lieu : archétype du jeune jazzman des années 60, Alexis est un saxophoniste pur jus qui se repose sur son cabriolet et sa bouteille d’alcool entre deux solos. Ensuite, le fil des évènements : comme pour un morceau de Jazz, Alexis se laisse porter par un thème central, « vers l’ouest », et improvise au gré de ses rencontres et de ses envies. Lors de cette escapade, il croise alors bon nombre de personne du sexe faible, dont les prénoms s’avèrent tous étrangement des déclinaisons de sa douce Mary : Maritie, Marie, Marielle, Marina, Marig… Il y a des moments d’accalmie, des bifurcations impromptues, entrecoupées de solos sur couchers de soleil… Evidemment, se dégage de ce road-movie une mélancolie inhérente au genre musical qu’il illustre. Les dialogues soignés, souvent en voix off, empruntent à moult reprise un lyrisme qui confine à la littérature. D’ailleurs, bien au-delà de l’idée qu’on se fait du jazz, l’œuvre toute entière est un brassage artistique : Bruno Le Floc’h fait une référence directe au poète d’Arthur Rimbaud (le temps du début du Bateau ivre) et son dessin évoque souvent l’œuvre du peintre Edward Hopper (auteur du célèbre Noctambules : le snack new-yorkais à moitié vide au coin d’une rue). Visuellement, pour les moments de plénitude, les cases se font tantôt dépouillées et baignées de lumière (le fond perdu du blanc de la planche), ou empruntent un style plus suggéré, plus spontané, pour les moments de débauche. Une formidable impro, qui émerveillera les amateurs du genre…