L'histoire :
A Paris, en avril 1643, la réputation de « Monsieur Vincent », prêtre entièrement dévoué aux miséreux, n’est plus à faire. L’ecclésiastique donne à chaque instant de sa personne, au cour d’épuisantes journées marathon. Il toque notamment à la porte des puissants afin de quêter un maximum de fonds, dans le but d’aider les plus démunis. Ce jour-là, il réclame pas moins de 6 000 livres à la marquise de Maignelais, sœur du général de Gondi. Et il ne lui cache pas la destination de cette somme : racheter Manon, une enfant exploitée par un proxénète, se faisant appeler « Chevalier » d’Aubrac. L’on reproche souvent à Vincent de s’acoquiner avec la pire engeance… mais lui explique que tous les hommes sont égaux devant Dieu. Il y a toujours des circonstances atténuantes, des explications aux destinées infernales et donc, tous méritent considération. A l’hôtel-Dieu, Vincent confie la jeune Manon à une sage-femme déjà débordée… mais Vincent sait être persuasif. C’est alors que deux brancardiers amènent Jérôme, une connaissance de Vincent. Il a été mortellement blessé et mourra dans les heures qui suivent. Qui a tué ce jeune gueux, pourtant bâtard issu de noble lignée ? Vincent mène sa petite enquête…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Vincent de Paul (ou Depaul), canonisé 77 ans après sa mort, est une figure mythique du catholicisme. Ce prêtre du XVIIème siècle est notamment connu pour avoir œuvré tout au long de sa vie en faveur des pauvres, sans distinction de mœurs ou d’origines. Jean Dufaux et Martin Jamar, compères d’ordinaires plus portés sur le Premier ou le Second Empire, lui rendent ici un bel hommage, à travers une splendide peinture du XVIIème siècle, dans les derniers mois du règne de Louis XIII. Il ne s’agit pas d’une biographie, dans le sens où nous ne suivrons Vincent à l’âge de 62 ans que durant quelques semaines. Ce dernier s’adonne à une sorte d’enquête sur la mort d’un jeune homme, un bâtard de noble famille. Ce biais est un prétexte – du reste parfaitement prenant – qui permettra au lecteur de faire le tour de la mentalité qui animait ce saint homme aussi proche des miséreux que des puissants. Le verbe est soigné (comme toujours chez Dufaux), mais surtout, la reconstitution historique est peaufiné, criante de réalisme. Les rues boueuses de Paris en 1643, les tenues et costumes d’époque, les intérieurs luxueux ou chiches, la rudesse des rapports humains, l’organisation sociale proche d’un système de caste, la dévotion suprême… La peinture historique est véritablement d’un excellent niveau au cours de l’intrigue ; elle se complète d’un dossier annexe tout aussi instructif, réalisée par Marie-Joëlle Guillaume. Cette BD ne manquera pas de faire de l’œil au jury œcuménique de la Bande Dessinée pour son Prix 2017. Cela dit, il n’est nullement nécessaire d’être pratiquant pour se cultiver, et cette BD remplit également les fonctions littéraires et pédagogiques…