L'histoire de la série :
La WEST (pour Weird Enforcement Special Team), est une équipe de 5 agents très spéciaux, au service direct du président Roosevelt (tout début du XXe siècle). Dirigés par Morton Chapel, un élégant rustre aux méthodes expéditives, ils disposent d’un certain nombre de passe-droits pour résoudre les affaires paranormales auxquels ils sont confrontés, en général par le biais d’interventions musclées…
L'histoire :
En 1903, à l’hôpital Saint Thomas de New York, la psychiatre Kathryn Lennox se penche sérieusement sur le cas de la jeune Megan Chapel, plongée dans un état catatonique profond depuis des années. En marge des soins quotidiens qu’elle lui prodigue, elle analyse aussi le père de cette dernière, Morton, afin de mieux comprendre le traumatisme infantile responsable de l’état de sa fille. Mais les séances de psychanalyse sont difficiles. Morton n’est pas homme à se livrer facilement, d’autant moins qu’il est rongé de culpabilité : il a jadis assassiné sa femme à coups de couteau, devant les yeux de Megan. Selon lui, le démon Seth s’était emparé de son épouse et s’il l’a tuée, c’était pour protéger Megan. Evidemment, Kathryn ne croit pas une seconde à ces élucubrations, mais elle les accepte afin de faire progresser l’analyse. La présence d’un docteur spécialiste en hypnose devrait en outre permettre de nouvelles expérimentations sur Megan… Ils ignorent tous que dans l’esprit reclus de Megan, le retord Seth prépare un « coming-out » en fanfare. Au même moment, Johan Verhagen, beau-père de Chapel, un richissime industriel qui tient le président Roosevelt à sa botte, fomente sa vengeance. Il vient d’apprendre avec 15 ans de retard que non seulement l’assassin de sa fille, son beau-fils Morton, est toujours en vie, mais qu’en outre, il travaille pour Roosevelt, à la tête de WEST ! Il impose alors au président un odieux chantage : l’assurance de sa réélection contre la mort de Chapel. Or le contrat sur la tête de Chapel échoit cyniquement aux autres membres de WEST…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Xavier Dorison et Fabien Nury l’avaient annoncé : ils emmènent cette fois leur équipe WEST au fond du fond de l’ignoble. En effet, tandis que les membres de cette brigade spéciale doivent tuer leur chef, Morton Chapel, ce dernier, isolé et aculé, ambitionne le meurtre de sa propre fille ! Aux frontières de la démence, les protagonistes se préparent donc, en quelques sortes, à un « deal perdant-perdant ». A nouveau, on retrouve ce mélange subtil entre western, thriller et paranormal clairement assumé, qui fait tout le sel de cette série sublime. Mais son atout fondamental provient de sa narration, exquise, d’une rare maturité. A chaque séquence, les auteurs font correspondre une technique narrative appropriée : la scène du bar, entremêlée à la nuit torride… la course poursuite, haletante… le climax au réveil de Megan, qui bascule pleinement dans l’horreur… Bien entendu, le dessin de Christian Rossi joue également un rôle majeur dans cette alchimie. Déjà, à la base, son coup de crayon réaliste, baigné de teintes ocre et sanguines, est d’une grande précision. Traits et lavis se sont rarement aussi bien imbriqués, se renvoyant tour à tour le rendu des scènes et des personnages, restituant à merveille le blanc des pages. Il y a en effet souvent une puissante source de lumière qui « transperce » la planche, ou un coin laissé béant, qui donne la sensation d’aspirer le lecteur. L’ambiance d’étrange et d’épouvante s’en trouve logiquement décuplée, sans compter que le rythme est au diapason, pour un effet maximal. Se jouant des modes et des techniques, l’artiste ose des découpages modernes astucieux (planche 14, avec le fauteuil roulant de Verhagen en ombre chinoise ou encore la réaction décomposée de Roosevelt à la page précédente). En un mot : virtuose, à tous points de vue ! On quitte logiquement cette première partie de diptyque dans un climat de tension au paroxysme.