L'histoire :
Le 14 avril 1912 à 23h40, le Titanic est en train de faire son voyage inaugural vers New York. A son bord, le jeune Max Waterson a posé sa lunette astronomique sur le pont avant. C’est ce qui lui permet de repérer, bien avant la vigie, l’iceberg géant vers lequel le paquebot file tout droit. Un accident effroyable est ainsi évité. Egalement à bord, le magnat de la presse William Stead a vent de la chose et la relate dans son New York Stars dès son arrivée. Le directeur comprend que ce gamin a du flair et il reste en contact avec lui. Six ans plus tard, Waterson toujours aux aguets lui apporte la preuve photographique que les parrains de la pègre sont en train de se partager la ville pour la distribution d’alcool, en raison du Volstead act à venir (instaurant la prohibition). Résultat : un article fait scandale et la prohibition est évitée. 14 ans plus tard, Max a terminé de brillantes études, tandis que son père faisait fortune dans les vins et spiritueux. Le père achève la construction de la plus haute tour de New York, qui fait sa fierté. Plus haute que l’Empire State Building ! Le vieux Stead est quant à lui mourant. Sans héritier, il lègue son empire au jeune Max. Deux jours plus tard, un krach boursier ravage brutalement l’économie américaine. Le père de Max se jette dans le vide du haut de sa tour, au moment même où Stead succombe à son cancer. En 1936, le jeune Waterson est désormais un brillant directeur de presse. Il cherche un titre accrocheur pour qualifier le prochain voyage d’affaires aux USA du sulfureux Adolf Hitler. Le chancelier allemand doit alors traverser l’Atlantique à bord du Titanic…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Fred Duval et Jean-Pierre Pécau se livrent certes à un énième exercice de réécriture historique… mais ce 17ème tome en one-shot se montre particulièrement habile et suscitera sans doute des remises en question. Comme à chaque fois avec cette série, un élément qui peut sembler anodin fait diverger la courbe des événements historiques tels que nous les connaissons. Ici, la sagacité d’un gamin permet au Titanic d’éviter son iceberg fatal et de réussir son voyage inaugural. De la survie de ce gamin (il mériterait d’être élu « l’homme de l’année » 1912 !), se déclinent des modifications en cascades : le gamin empêche aussi la prohibition ; sa famille fait fortune ; il bâtit un empire qu’il voue à une cause humaniste ; le Titanic est encore là en 1936 pour… sombrer (cette fois !) et emporter Hitler dans les abysses ; les progrès technologiques majeurs sont fait plus tôt ; la lutte contre les inégalités et les famines devient une réalité et aboutit à une société aseptisée ; une rébellion à ce système crispe de nouveaux blocs ; etc. La force de ce récit utopique brillant et dessiné dans les règles de l’art par Damien, est de s’étayer sur une mentalité bienveillante née des maux du XXème siècle, plutôt que sur une transmutation assommante de dates et d’événements issus de l’érudition de Pécau. On ressort tout de même marqué ou désespéré de cet essai prospectiviste très intéressant, car l’hypothèse humaniste des auteurs se heurte à des problèmes imprévus. L’homme serait-il un loup l’homme ? L’enfer serait-il pavé de bonnes intentions ? Finalement, qu’est-ce que le fascisme ? Vous avez 4 heures…