L'histoire :
Charles empile les dernières nouveautés dans la librairie qui l’emploie, lorsque son portable retentit : son père lui propose de se rendre dans la maison de son grand-père récemment décédé pour y récupérer du matériel avant que la maison ne soit vendue. Bien que l’idée ne l’emballe pas plus que ça, il prend la route pour Plouhinec-les-deux-corbeaux. Chemin faisant, il se souvient des moments qu’il a passés au village, enfant, et de ses habitants… Ainsi il revoit les deux Jean Gerroux : celui du haut du bourg… et celui du bas. L’un, orphelin né à Buchenwald d’une mère résistante trop rapidement décédée… et l’autre héros de la résistance, qui passa une nuit avec Michèle avant qu’elle ne soit déportée. Père et fils ? Même pas ! Et puis c’est l’image d’Elvis Gruttier qui s’impose à lui. Pendant qu’un autre Elvis enflamme l’Amérique en chantant comme un Dieu, il se contente d’entonner des cantiques à l’église… devant Dieu. L’un joue de la guitare comme personne, l’autre la pince mais pour personne. A chacun son Elvis : Graceland ou la Petite Janaie… Le village, c’était aussi le temps des bons copains, celui où l’on faisait la guerre à ceux de Ribignole (c’est des couilles molles !), celui de l’impressionnante poitrine de la mère d’Emilio, celui de Lolo la nantaise, du gros Michel, le commis de pépé et de sa chienne Pernod…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Il y a eu Longeverne et Velran, les Lebrac ou l’Aztec, la Marie Tintin, Migue la Lune et le p’tit Gibus évidemment, qui, sous la plume de Louis Pergaud, emplirent nos narines d’une précieuse odeur de terre et de fumier… Quelques décennies plus tard, Charles Dutertre suit les traces de son brillant ainé en nous emmenant en balade dans un village dont le nom fleure la Bretagne rurale. Sur la route qui nous y conduit, il utilise de courtes histoires qui sont prétextes à un intéressant trombinoscope et aventures délicieuses de gamins. L’angle narratif est efficace : un ton humoristique doublé d’une sensibilité enfantine permettant de nous faire sourire sans se moquer. C’est clair, ça va à l’essentiel, ça donne envie de poser les fesses dans l’herbe mais ça manque peut être un peu de liant, car l’issu du voyage qui permet ce savoureux descriptif est plus confuse et moins travaillée. Graphiquement, on retrouve la même naïveté enfantine qui confère au trait une rondeur simplissime, laissant penser (à tort) qu’il est facile de dessiner. On sent que la priorité n’est pas de peaufiner, mais d’aller à l’essentiel pour laisser toute la place au récit. C’est un choix… Celui souvent opéré au sein de cette sympathique collection (qui lave la tête en faisant des bulles) qui ne cherche pas à faire de l’esbroufe, parfois au détriment du plaisir des yeux.